Manuel - Droit commercial. Tome 2 - 31e - 428

DROIT COMMERCIAL
leur est reconnu par le droit coutumier international. Or on peut douter
que la protection qu'elles confèrent soit encore justifiée lorsque les États
ou leurs émanations interviennent dans le commerce international
comme pourrait le faire un opérateur privé. Les droits anglais et américain
font à cet égard une distinction fondamentale entre « les actes d'autorité »
qui sont couverts par ces immunités, et « les actes de gestion » pour lesquels
ils écartent ces privilèges. La Convention européenne du 16 mai
1972 sur l'immunité des États, convention non signée par la France, procède
d'un même point de vue puisqu'elle réserve l'immunité de juridiction
aux seuls actes accomplis par l'État dans l'exercice de sa puissance
publique. Quant à la Convention des Nations unies du 2 décembre 2004
sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens, qui est censée
refléter le droit coutumier, et qui a quant à elle été signée et ratifiée
par la France (même si elle n'est pas encore entrée en vigueur), elle est
encore plus explicite puisqu'elle prend soin d'exclure le jeu de l'immunité
étatique dans les procédures concernant « des contrats et transactions de
caractère commercial conclus avec une personne physique ou morale
étrangère » (art. 10), tout en précisant que ce caractère commercial doit
être apprécié en tenant compte de la nature du contrat ou de la transaction,
mais aussi du but des parties (art. 2-2).
Quant à la position du droit français, s'agissant des immunités de juridiction,
elle est de source prétorienne, la Cour de cassation ayant posé en principe
que le jeu de la protection est circonscrit aux cas dans lesquels le contrat
qui donne lieu au litige est « un acte de puissance publique ou a été accompli
dans l'intérêt d'un service public » (Cass. 1re
Express, Rev. crit. DIP 1970, p. 102, note Bourel ; Cass. 1re
ibid., 1991, p. 140, 1re
esp., note Bourel ; v. dernièrement Cass. 1re
civ., 25 févr. 1969, Sté Levantciv.,
2mai 1990,
civ., 3mars
2021, nº 19-22855). C'est dire que pour les contrats qui ne constituent pas en
eux-mêmes des actes de puissance publique, ce qui est déterminant, c'est la
finalité de l'acte. À titre d'illustrations, on notera que le jeu de l'immunité a
été accordé à un État étranger mis en cause pour répondre d'un emprunt
contracté « dans l'exercice de sa souveraineté » (Cass. 1re
civ., 6 nov. 2019,
nº 18-16437, emprunts russes), ou à un autre mis en cause pour répondre
d'un contrat de lobbying passé pour faciliter l'implantation d'une université
(Cass. 1re
civ., 3mars 2021, préc.). En revanche, le bénéfice de l'immunité
juridictionnelle a été refusé à une société de certification agissant pour le
compte d'un État étranger au motif que cette activité ne relevait pas d'un service
public (Cass. 1re
civ., 17 avr. 2019, nº 17-18286 ; adde CJUE, 7mai 2020,
aff. C-641/18), tout comme elle l'est classiquement dans les contentieux opposant
les États ou organismes d'État étrangers à des salariés qui n'ont pas « de
responsabilité particulière dans l'exercice de prérogative de puissance
publique » (Cass. soc., 1er
juill. 2020, nº 18-24643).
S'agissant des immunités d'exécution, la jurisprudence considérait tradiciv.,
2 nov. 1971, Rev. crit.
civ., 28mars 2013, no
10-25938, 11tionnellement
qu'elle couvrait seulement « les biens affectés à une activité
de souveraineté ou de service public » (Cass. 1re
DIP 1972, p. 310, note Bourel ; Cass. 1re
10450, 11-13323, NML c/Argentine), à l'exclusion donc « des biens affectés à
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