Manuel - Droit des affaires internationales - 4e - 357

La formation du contrat international
Avec des cocontractants étrangers, le choix de la langue vernaculaire de
préférence à l'anglais constitue sans aucun doute un signe d'ouverture
culturelle et commerciale. En France et dans les pays francophones,
entre parties francophones, le choix de l'anglais n'est que le signe d'une
standardisation des contrats et d'un recul de la technique contractuelle
continentale, avec des risques importants pour les parties.
635. Interprétation, ordre juridique de référence et définitions
contractuelles. - Il existe en premier lieu un lien très fort entre la langue
utilisée60
et les concepts juridiques qu'elle véhicule. Un contrat soumis au
droit anglais doit naturellement être rédigé en anglais et l'interprétation
de ses clauses se fera par référence à la jurisprudence et à la doctrine britanniques.
Lorsque le contrat est soumis à une autre loi, par exemple un
contrat de société constituée au Luxembourg, la rédaction en langue
anglaise ne donne plus d'autorité particulière au droit anglais pour l'interprétation
de concepts qu'il a pourtant forgés, ce qui accroît l'insécurité
juridique. En deuxième lieu, des difficultés liées à la traduction du contrat
et des normes étrangères61
auxquelles il renvoie ne manquent pas d'apparaître.
D'abord, certains termes juridiques étrangers ne peuvent faire l'objet
d'aucune traduction car ils véhiculent des concepts inconnus : tel est le
cas de la fameuse Consideration du droit anglais que l'on assimile bien
imparfaitement à une contrepartie. Ensuite, la langue juridique regorge
de faux amis qui tromperont le lecteur non avisé ; ainsi Determinable renvoie
la faculté de résilier et non à la faculté de déterminer. En troisième
lieu, la coexistence de plusieurs versions linguistiques d'un même contrat
soulève d'importantes difficultés. Ont-elles la même autorité et sinon
laquelle choisir ?
D. Les obligations des parties
636. Obligations implicites. - Les difficultés d'interprétation évoquées
jusqu'à présent ont toutes un impact sur la bonne compréhension
des obligations des parties. Il faut ajouter à ces incertitudes entourant les
obligations principales faisant l'objet de stipulations expresses l'incertitude
liée aux obligations implicites découlant de la nature des choses ou
des usages. Dans les juridictions de Common law, on parle d'« implied
terms ». L'article 5.1.2 des Principes Unidroit détaille ainsi les sources possibles
des obligations implicites :
Art. 5.1.2 - Obligations implicites
« Les obligations implicites découlent :
a) de la nature du contrat
b) des pratiques établies entre les parties et les usages
c) de la bonne foi
d) de ce qui est raisonnable. »
60. Voir M. FERNET, La langue et le droit dans les relations internationales, thèse Dijon 2009, E. Loquin (dir).
61. Ph.MALAURIE, « Le droit international privé français et la diversité des langues », JDI1965, p. 587 ;
O. CACHARD, « Translating the French Civil Code : Politics, Linguistics and Legislation », Connecticut Journal
ofInternational Law, Vol. 21, Fall 2005, p. 41-66.
357

Manuel - Droit des affaires internationales - 4e

Table des matières de la publication Manuel - Droit des affaires internationales - 4e