Les Intégrales - Volume 21 - Les pactes d'affaires - 1re - 302

LES PACTES D'AFFAIRES
associés de décider de la vente d'un immeuble appartenant à la société devait être considéré
comme caduc en raison du décès de l'un des signataires dès lors qu'il avait été
conclu en contrepartie de la donation-partage de la nue-propriété des parts sociales de
la société par l'associée décédée aux autres associés, ses enfants, et constituait avec
cette donation un ensemble contractuel destiné à lui assurer jusqu'à son décès la jouissance
de l'immeuble101
.D'autres applications pourraient être trouvées concernant les
montages incluant des pactes de famille.
Si les parties souhaitent lier indéfectiblement des contrats de l'ensemble, elles peuvent
introduire une clause d'indivisibilité102
. Cette clause permettra d'imposer la fin du contrat
lié en cas de disparition du contrat principal. Une autre technique est de prévoir que le
pacte sera résilié de manière anticipée en cas de disparition de la société dont il est l'objet
(ou d'un autre contrat jugé indispensable à son exécution ou à l'équilibredel'opération
d'ensemble)103
liée non pas à l'inexécution du pacte mais à la survenance d'un événement extérieur104
.Ilne s'agira alors pas d'une caducité mais d'une simple clause résolutoire,
.
En toute hypothèse, l'application de l'article 1186, al. 1 du Code civil, prévoyant la caducité
du contrat pour disparition d'un de ses éléments essentiels, pourrait conduire à
reconnaître la caducité d'un pacte extrastatutaire appartenant à un montage familial
lorsque, par exemple, la société holding qu'il vise disparaît ou encore lorsque la donation
des titres sur laquelle reposait l'opération est annulée.
§II - L'éventuel droit de propriété intellectuelle
du concepteur
355 Propriété intellectuelle. - La confection de montages, qui consiste à agencer des
éléments en fonction d'un objectif juridique et/ou économique précis, et qui est le fait
de juristes, véritables « ingénieurs du droit »105
propriété intellectuelle ?
peut-elle être protégée par un droit de
Certains auteurs le pensent, et notamment Didier Poracchia, dans sa thèse de
doctorat106
, écrit : « La qualification de création originale doit être reconnue au montage
juridique. D'une part, le professionnel est, au moins partiellement, libre d'exprimer l'idée
qui préside à l'élaboration de son œuvre et de la matérialiser sous différentes formes par
la rédaction d'un écrit. D'autre part, il doit, lors de la rédaction du montage, arbitrer et
choisir dans un fond d'articles de code et d'ouvrages doctrinaux les différentes règles à
mettre en œuvre. Or ces choix et arbitrages se traduisent par une présentation, un plan
et un agencement des clauses personnels à l'auteur, caractérisant par là même un
travail de composition original ». De même, les professeurs Vivant et Bruguière107
soulignent
cette possible originalité du montage juridique en ces termes : « Un montage juridique
ne se réduit pas toujours à des connaissances juridiques. L'important est en effet
l'agencement particulier des règles connues. Pour reprendre un vocabulaire propre au
droit des brevets, l'on peut dire que les montages apparaissent comme " des combinaisons
nouvelles de procédés connus " . Il est tout à fait possible de considérer un agencement de
(101) Cass. com., 7 juill. 2004, nº 02-19508.
(102) M. LATINA, « Clause de divisibilité et d'indivisibilité », in Les principales clauses des contrats d'affaires, dir. F. Buy,
M. Lamoureux, J. Mestre et J.-C. Roda, 2e
éd., 2018, nº 504.
(103) V. par ex. CA Paris, ch. comm., 15 déc. 2020, précit. : le pacte comportait une clause prévoyant que : « Les parties
conviennent néanmoins que le Pacte se terminera de plein droit et par anticipation [...] à l'égard de tout actionnaire
ayant cessé de détenir directement ou indirectement une ou des actions de la Société. »
(104) Sur cette question plus largement v. J. HEINICH, « Le sort du pacte extrastatutaire d'associés lors d'un événement
affectant l'un de ses signataires », Rev. sociétés2014, p. 475.
(105) Expression utilisée de Jean Paillusseau, dans les Mélanges Champaud, Dalloz, 1997, p. 493, reprise par M. VIVANT
et J.-M. BRUGUIÈRE, Droit d'auteur et droits voisins,4e
éd., Dalloz, 2019, nº 149.
(106) Recherche sur les montages conçus par les professionnels du droit, PUAM, 1998, préface J. Mestre, p. 102.
(107) Op. cit., nº 149.
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