Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 11e - 63

Les normes
Le droit de l'Union a conduit à une évolution du régime de responsabilité
de l'État du fait des lois et du fait des décisions de justice.
Dès les arrêts du 28 février 1992, Stés Rothmans international et
Philip Morris, le Conseil d'État juge que la responsabilité de l'État
est engagée par la mise en application de dispositions législatives
incompatibles avec les orientations d'une directive : le droit français
répond, sur le terrain de la responsabilité, aux exigences exprimées
par la Cour de justice dans ses arrêts Francovich, du 9 novembre
1991, et Brasseries du Pêcheur, du 5 mars 1996.
Cette jurisprudence a reçu une portée générale avec la décision
Gardedieu du 8 février 2007, qui consacre un nouveau cas de responsabilité
de l'État du fait des lois, indépendamment même de toute
mesure administrative d'application. Depuis l'arrêt du 14 janvier
1938, Société des produits laitiers « La Fleurette », la responsabilité
de l'État législateur est susceptible d'être recherchée, sur le terrain
de l'égalité devant les charges publiques, en cas de préjudice anormal
et spécial résultant de dispositions législatives, dès lors que le
législateur n'a pas entendu exclure toute indemnisation de ce chef.
Le Conseil d'État a appliqué ce régime de responsabilité sans faute
en cas de préjudice grave et spécial résultant d'un traité régulièrement
introduit dans l'ordre juridique interne (30 mars 1966, Compagnie
générale d'énergie radio-électrique) ou même de l'application de
la coutume internationale (14 oct. 2011, Mme
Saleh). La responsabilité
de l'État peut désormais être également engagée du fait de l'adoption
d'une loi qui méconnaît les engagements internationaux ou
européens de la France : en raison des obligations qui incombent à
l'État en vue d'assurer le respect du droit international et européen,
l'ensemble des préjudices subis du fait de l'intervention d'une telle
loi, et pas seulement ceux qui ont un caractère anormal et spécial,
ouvrent droit à réparation.
Si, pour les lois, la jurisprudence a étendu au droit international
le régime de responsabilité construit d'abord pour le droit communautaire,
la responsabilité de l'État du fait des décisions de justice
obéit à des règles particulières en matière européenne.
En règle générale, selon les principes posés par un arrêt Darmont
du Conseil d'État du 29 décembre 1978, une faute lourde commise
par une juridiction administrative dans l'exercice de sa fonction
juridictionnelle engage la responsabilité de l'État, dès lors qu'elle ne
résulte pas d'une décision juridictionnelle définitive. Ces principes
connaissent une double atténuation en matière européenne.
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