Systèmes - Les autoroutes, une affaire d'État - 40

Les autoroutes, une affaire d'État
un bien public pur car de manière abstraite, n'importe quel citoyen
pourra bénéficier de cette fonction en cas de guerre33
.
On comprend alors pourquoi de tels biens qui s'apparentent à
des services collectifs ne peuvent être produits par une société privée
qui serait incapable de rentabiliser son investissement en proposant
le bien (à cause de son caractère de non-rivalité et de non
appropriabilité) ou en faisant payer son usage (à cause de son caractère
de non exclusivité).
D'autres biens publics ne remplissent pas parfaitement ou complètement
les deux caractéristiques de non-rivalité et non-exclusivité
: ce sont les biens publics « impurs ». C'est le cas de toutes les
infrastructures de réseaux (transports et télécommunication). Par
exemple le caractère de non-rivalité des autoroutes n'est pas parfait.
Certes, elles ne sont pas appropriables. Cependant si, en général, le
passage d'une voiture sur une autoroute n'empêche pas le passage
d'une autre voiture, on sait bien qu'il peut y avoir des phénomènes
de congestion, particulièrement aux postes de péage qui peuvent
engendrer des embouteillages (même si plusieurs opérateurs ont
commencé à expérimenter le système de « free flow»34
sans arrêt à
la barrière de péage). Il y a bien alors parfois une forme de rivalité qui
ferait des autoroutes des « biens publics impurs ». Cependant il serait
difficile de distinguer les autoroutes sur lesquelles les postes de
péage engendrent des embouteillages et qui seraient des biens
publics « impurs » et les autoroutes qui demeureraient des biens
publics « purs » (en dépit du système de péage) lorsque ces péages
sont fluides et ne sont pas encombrés (ce qui est de plus en plus le
cas avec la mise en place de péages automatiques)35
.
Mais c'est surtout la seconde caractéristique qui fait défaut aux
autoroutes pour être qualifiées de biens publics « purs ». En effet,
même si une autoroute est indivisible d'un point de vue de l'offre,
elle est divisible du point de vue de l'usage, il y a une entrée et une
sortie d'autoroute que les véhicules empruntent tour à tour, ce qui
rend possible l'exclusivité et donc le paiement de l'usage.
Les autoroutes sont donc, semble-t-il, des biens publics
« impurs ». Cette qualification est primordiale, car c'est elle qui
33. X. GREFFE, Économie des politiques publiques,2e
éd., Dalloz, 1997, p. 401.
34. Le « free flow » est un nouveau système de paiement dématérialisé des autoroutes. Il
repose sur de nouvelles technologies permettant de reconnaître un véhicule grâce à
son badge ou à la lecture de sa plaque d'immatriculation sans que le véhicule ne s'arrête,
ce qui permet plus de fluidité.
35. Sur cette distinction, J.-D. LAFAY,J. E. STIGLITZ,C. E. WALSH, Principes d'économie moderne,
De Boeck, 2014, p. 257
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