Hors collection - Financement de la santé et de l'éducation dans un monde en mutation - 21

Michel Bouvier
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et financier, les collectivités locales, les acteurs sociaux... Chacun a poursuivi sa
propre logique, souvent sur fond de corporatisme et de court- termisme. La société
a continué à fonctionner « en silos ». Elle est peu à peu devenue celle du « chacun
chez soi », sinon du « chacun pour soi », autrement dit d'un hyper- individualisme
ou, si l'on préfère, d'une mosaïque d'égoïsmes.
Ainsi, au- delà de la crise sanitaire ou encore de la crise économique et sociale
que le confinement et l'arrêt ou le ralentissement des activités ont engendrées, c'est
aussi face à la crise d'un modèle politique, moins perceptible, que nous sommes
placés. Et cela même si, depuis la crise des subprimes et maintenant celle du covid19,
l'intervention de l'État est vue comme la solution aux problèmes ; même si,
dès que des crises majeures apparaissent, les regards se tournent immédiatement
et systématiquement vers l'État central perçu comme une puissance en mesure
de les résoudre.
L'État est en effet perçu comme l'ultime recours. L'assureur ultime contre
les risques. On pourrait penser qu'une telle attitude est fondée, du moins si l'on
regarde les budgets des pays considérés comme les plus riches, par exemple les
États- Unis, l'Allemagne, le Royaume Uni ou la France. Or, malgré une apparente
puissance économique et financière, on a pu constater une pénurie de moyens non
seulement à l'hôpital, mais aussi dans beaucoup d'autres services publics. On peut
donc se demander ce qui ne va pas, d'où provient cette pénurie.
On peut déjà avancer l'idée que nous faisons peut- être fausse route, que la
confiance dans la toute- puissance de l'État relève d'une croyance erronée, d'un
imaginaire et d'un monde disparu idéalisé, celui des Trente glorieuses. On peut
cependant s'en rendre très clairement compte, l'État utilise les quelques moyens
qu'il peut encore actionner : principalement, et à court terme, le recours à l'emprunt.
Or, on le sait bien, si la relance n'est pas au rendez- vous, si les plans mis
en œuvre dans les différents pays ne sont pas suivis des effets escomptés, une telle
solution n'est pas viable sur le long terme.
Il est donc crucial de prévenir cette éventualité et de réexaminer notre modèle
de société et notamment celui des finances publiques et du secteur public dans ses
rapports avec le secteur privé. Car l'État pourrait bien être rapidement débordé en
ne pouvant assumer seul les chocs qui se multiplient, en n'en ayant plus les moyens.
Les risques, les chocs, se sont en effet démultipliés ces dernières années. Ils sont
plus variés, plus fréquents et plus nombreux qu'auparavant et aussi plus dangereux.
Ce ne sont pas seulement des chocs, des risques économiques ou financiers
ni même sanitaires qui nous menacent. Il y en aura d'autres qui vont s'ajouter
ou se combiner entre eux et dont certains sont déjà là à l'état naissant : je pense à
l'explosion démographique, à la fracture territoriale, au réchauffement climatique,

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