Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 107

Bertrand Maumont
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Mais l'intérêt de la démarche de Bonnecase se situe ailleurs que dans la mise
en évidence d'une réglementation « généralisable ». Planiol, vingt- cinq ans avant
lui, avait déjà présenté, dans le premier tome de son Traité élémentaire de droit
civil, une « théorie générale des actes juridiques »82
nettement dissociée du droit des
obligations. Il est vrai que Bonnecase va au- delà puisqu'il inclut les faits juridiques
dans sa construction, mais sur ce point les résultats qu'il obtient sont modestes83
.
L'intérêt, en réalité, est d'un autre ordre. D'abord, Bonnecase porte un éclairage
sur la méthode adoptée par ses prédécesseurs en mettant en évidence le fait que
les théories générales sont élaborées à partir du droit positif. Surtout il démontre
que le code Napoléon comporte une réglementation comparable à celle du BGB84
malgré l'absence de partie générale85
allemand qui consiste à reléguer le fait juridique dans une section du livre II, intitulée
Rapports particuliers d'obligations, et à ne l'envisager qu'à travers les notions
d'enrichissement sans cause et de faits illicites86
.
, alors qu'il s'agirait, en Allemagne
comme ailleurs, d'une notion plus générale87
Que reste- t-il aujourd'hui de l'émancipation recherchée par Bonnecase, de
cette idée que la division de l'acte juridique et du fait juridique domine tout le
droit civil ? Pour répondre à la question on peut, comme le préconisait Portalis,
« faire la part de la science et la part de la législation »88
.
Sur le plan législatif, aucune théorie générale n'a été consacrée, en ce sens que
le Code civil ne renferme pas de réglementation générale formellement dédiée à
l'acte juridique et au fait juridique. L'intérêt de légiférer à un tel degré de généralité89
a
été longuement discuté à partir de 1945 au sein de l'Association Henri
82. V. M. Planiol, op. cit., t. I, p. 107 et s.
83. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., n° 367. Il identifie les différents faits juridiques, le degré de
volonté qu'ils renferment, les conséquences juridiques qui en découlent et le principe de liberté de la
preuve qui s'applique à eux.
84. La section III de la Partie générale du B.G.B., intitulée « actes juridiques » (§ 104-185), renferme
des règles d'application générale concernant la capacité d'exercice des droits, les déclarations de volonté,
la conclusion du contrat, la condition et le terme, la représentation, l'autorisation et l'approbation. Les
règles propres au droit des obligations sont contenues dans le Livre II du B.G.B. (§ 241 et s.), intitulé
Droit des rapports d'obligation.
85. V. spéc. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., n° 365, p. 419.
86. Ibid., n° 268, p. 299 et n° 364, p. 419.
87. Ibid., n° 364, p. 419.
88. V. F. Fenet, Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, vol. 6, Videcoq, Paris, 1836,
p. 43 où Portalis justifie ainsi la méthode de codification : « il nous a paru sage de faire la part de la
science et la part de la législation. Les lois sont des volontés. Tout ce qui est définition, enseignement,
doctrine est du ressort de la science. Tout ce qui est commandement, disposition proprement dite, est
du ressort des lois ».
89. V. J. Hauser, thèse préc., n° 25 et s.
. Il va même jusqu'à relever le défaut du code
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