Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 108

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L'acte et le fait juridiques chez Bonnecase
Capitant90 et dans le cadre de la Commission de Réforme du Code civil91
. Les
discussions ont abouti à un avant- projet qui n'a jamais vu le jour, qui prévoyait
d'inclure des dispositions relatives à l'acte juridique et au fait juridique dans un
livre IV précédant celui relatif aux contrats et aux obligations. Au lieu de cela, la
réforme du 10 février 2016 a entériné la summa divisio sous le Titre III relatif aux
sources d'obligations en prenant ainsi le contrepied de l'émancipation prônée par
Bonnecase. Ce dernier, bien malgré lui, n'est sans doute pas pour rien dans cette
situation en ce qu'il a contribué à diffuser l'idée que le droit commun des contrats
comporte l'essentiel des règles applicables à l'acte juridique92
qui a marqué les esprits, notamment celui de Carbonnier93
. C'est cette réalité
et qui, s'ajoutant à la
faiblesse des règles générales applicables au fait juridique, a conduit au dispositif
actuel. Pour qu'il en aille autrement, il aurait fallu dégager des règles générales
propres à l'acte juridique et au fait juridique, distinctes des règles spécialement
prévues pour les contrats et les différentes catégories de faits juridiques94
. Or, ce
n'est pas ce qui a été décidé, d'une part, parce que la catégorie des faits juridiques
est très hétérogène et génère finalement peu de règles communes et, d'autre part,
parce que dans le système français, le droit commun des contrats comporte déjà
des règles très générales95
. Il aurait donc fallu déshabiller le contrat pour habiller
l'acte juridique, ce qu'on s'est refusé à faire.
C'est sur le plan scientifique que la théorie de l'acte juridique et du fait juridique
a véritablement prospéré. D'abord elle présente un intérêt d'ordre didactique
comme en témoigne l'emploi de la summa divisio dans les manuels de droit des
90. V. Trav. Ass. Capitant, 1945, t. 1, p. 73 et s.
91. V. Trav. de la C.R.C.C., 1946-1947, Sirey, Paris, 1948, p. 237 et s.
92. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., n° 366, p. 420 : « les articles concernant l'acte juridique sont, par
la force même des choses, concentrés au livre III, titre III : Des contrats ou des obligations conventionnelles en
général, puisque les rédacteurs du Code civil ont vu dans le contrat l'expression- type de l'acte juridique ».
93. J. Carbonnier, Droit civil, t. II, PUF, 2004, n° 933, p. 1948.
94. V. P. Ancel, op. cit., n° 11, qui souligne l'écart avec le système allemand dont la théorie de l'acte
juridique « permet de dégager les règles générales applicables à tout acte juridique, qu'il soit ou non
contractuel, en les séparant des règles spéciales à chaque catégorie d'acte juridique (...) ».
95. V. J. Bonnecase, Précis de droit civil, op. cit., t. 2, p. 226 et s. qui consacre, dans une partie relative
au contrat et à l'acte juridique en général, un chapitre premier portant sur les « éléments constitutifs du
contrat et de l'acte juridique en général » puis, dans un second chapitre, des particularités de la réglementation
des éléments constitutifs du contrat « dans le cadre de l'acte juridique en général ». En somme,
l'acte juridique n'est pas spécifiquement traité, indépendamment du contrat.
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