Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 119

Bertrand Maumont
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Chénedé nomme la « source de la source de l'obligation »173
. Par où l'on retrouve
la distinction de la technique et de la science mise en évidence par Bonnecase. Ce
dernier explique très clairement les implications d'une telle présentation : « quand
nous avançons que l'acte juridique a pour fonction de mettre en mouvement les
règles de droit et les institutions juridiques, que nous rattachons par conséquent
à la loi, expression normale de ces règles et de ces institutions, les effets des actes
juridiques, nous n'entendons nullement reconnaître au législateur un pouvoir
arbitraire en ce dernier domaine ; nous supposons, au contraire, que la loi a été
élaborée en conformité de l'élément rationnel et de l'élément expérimental du
droit, autrement dit en conformité des sources réelles des règles de droit »174
.
Bonnecase livre, en définitive, une théorie positiviste de l'acte juridique et
du fait juridique, une théorie épurée, dégagée de sa gangue philosophique. Pour
autant, cet aspect de la contribution de Bonnecase semble quelque peu tombé
dans l'oubli. De l'époque et de ce courant de pensée on a surtout retenu la théorie
positiviste de Duguit175
puis, plus tard, la théorie normativiste de Kelsen176
. Ces
théories positivistes n'ont d'ailleurs pas manqué de soulever des controverses en ce
qu'elles réduisent le rôle technique des volontés à une fonction de déclenchement
de la norme supérieure177
.
B. La volonté comme moteur178
Bonnecase met une nouvelle fois en garde : « si l'on veut arriver à déterminer
d'une manière exacte le rôle de la volonté dans l'acte juridique et le fait juridique,
d'après le droit positif français, il faut se garder d'une confusion dans laquelle sont
trop souvent tombés certains auteurs entre le point de vue technique et le point
de vue scientifique »179
. Partant de là, il distingue deux rôles susceptibles d'être
attribués à la volonté.
173. F. Chénedé, op. cit.
174. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., n° 436, p. 530-531.
175. Rappr. L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, op. cit., § 26, p. 221 : « quand il y a un acte
juridique, c'est le droit objectif qui rattache l'effet de droit, l'ouverture de la voie de droit, à l'acte de
volonté qu'est l'acte juridique, quelle que soit d'ailleurs l'espèce d'acte juridique dont il s'agit ».
176. V. H. Kelsen, « La théorie juridique de la convention », Arch. phil. dr. 1940, n° 1-4, p. 33 et s.,
spéc. p. 34.
177. Sur la critique des théories positivistes développées par Duguit et Kelsen, v. not. J. Hauser, thèse
préc., p. 55 et s. ; G. Wicker, thèse préc., n° 30 et s. ; C. Brenner et S. Lequette, « Acte juridique »,
op. cit., n° 70.
178. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., n° 320 : « la technique sainement appliquée conduit manifestement
à faire de l'acte juridique le moteur de la loi et rien de plus ».
179. J. Bonnecase, Suppl., t. II, op. cit., p. 437.
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