Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 126

120
Jean Hauser et la théorie de l'acte juridique
n'est donc que relative. Un inventaire est nécessaire, qui sera nécessairement partiel
(et peut- être partial).
6. Ainsi, l'idée selon laquelle l'acte juridique constituerait un complexe d'éléments
subjectifs et objectifs est largement admise par la doctrine, du moins par la
doctrine privatiste (I). C'est là l'apport le plus décisif de Jean Hauser que d'avoir
mis fin à la querelle entre objectivisme et subjectivisme. En revanche, son refus
d'accueillir la théorie normativiste de l'acte juridique est aujourd'hui globalement
rejeté, y compris par la doctrine privatiste (II). Celle- ci hésite de moins en moins
à marier le normativiste à une conception volontariste de l'acte juridique, pour
donner naissance à des théories éclectiques de l'acte juridique ou du contrat - et
non plus seulement synthétiques.
I - L'ACTE JURIDIQUE,
UN COMPLEXE D'ÉLÉMENTS OBJECTIFS ET SUBJECTIFS
7. C'est à dessein que nous utilisons le terme de « complexe » pour désigner
l'acte juridique selon Jean Hauser, plutôt que les termes de synthèse ou de combinaison
qui pourraient également convenir23
. Il fait écho à la volonté de Jean Hauser
de retranscrire la complexité de la réalité de l'acte juridique, quitte à renoncer à
en formuler une définition directement opératoire sur un plan pratique24
. Jean
Hauser cherche en effet à démontrer la simplification dont procède l'idée d'une
opposition radicale entre le subjectivisme et l'objectivisme, idée selon laquelle
les rapports entre la volonté et les éléments objectifs seraient exclusivement des
rapports de contrainte de ceux- ci sur celle- là.
8. Bien au contraire, Jean Hauser montre que tout acte juridique suppose
une action de la volonté sur une base objective minimale. Il n'y a pas d'acte
purement subjectif ou purement objectif, mais toujours une combinaison de
subjectivisme et d'objectivisme dans l'acte juridique. Au sein de cette combinaison,
les rapports possibles de la volonté et des éléments objectifs sont tout
23. Encore que le terme de « complexe » soit à certains égards le plus adéquat. V. « Complexe », sens 2.
A, in A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, 2e
éd., PUF, coll. Quadrige, 2006 :
« Système physique ou logique composé d'éléments distincts organisés par des relations définies ».
24. J. Hauser, op. cit., n° 90, p. 140. À l'objection qui pourrait lui être faite de l'imprécision de son
analyse des rapports entre l'ordre juridique et la liberté contractuelle, Jean Hauser répond : « une théorie
générale de l'acte juridique prétend expliquer ce réel mais ne prétend point en tirer directement des
conclusions pratiques, la complexité et même l'imprécision ne peuvent l'arrêter si le réel est complexe
en lui- même et imprécis pour l'homme qui ne peut prendre la mesure de sa liberté ».

Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ?

Table des matières de la publication Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ?