Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 147

Guillaume Drouot
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raisons, il ne paraît donc pas incongru de mesurer l'héritage de Duguit à travers
sa diffusion dans les introductions au droit contemporaines7
.
Pour liquider cet héritage, notre démarche consistera à revenir sur la distinction
entre le droit objectif et les droits subjectifs telle qu'elle est classiquement exposée
(I), puis à présenter le droit objectif chez Léon Duguit (II) avant de s'interroger
sur la possible reprise de ses idées dans nos introductions contemporaines (III).
I - LA DISTINCTION ENTRE LE DROIT OBJECTIF
ET LES DROITS SUBJECTIFS
Présentation. - Pourquoi les auteurs, au moment de parler du droit devant
un auditoire a priori ignorant tout du sujet, distinguent le droit objectif et le droit
subjectif ? De manière récurrente, les ouvrages s'appuient sur la polysémie du mot
droit. Parler de « droit », c'est désigner deux choses, que les adjectifs objectif et
subjectif permettent de distinguer. Il y a d'un côté le droit entendu comme un
corps de règles et, d'un autre côté, le droit entendu comme la prérogative que
détient la personne qui entend agir, étant alors souvent précisé que cette prérogative
est attribuée au sujet par le droit objectif.
Double sens. - La distinction serait donc avant tout sémantique. Distinguer
le droit objectif et le droit subjectif renverrait à deux définitions différentes du
droit. Évoquer le droit civil, le droit communiste, le droit belge, c'est renvoyer à
des ensembles de règles, donc au droit objectif. Se demander si telle personne a le
droit de faire ceci ou cela, c'est invoquer un droit subjectif.
Articulation. - Puis, la distinction serait également logique. Nous voulons dire
par là que les deux notions de droit objectif et subjectif seraient liées entre elles.
Le droit subjectif n'existe que s'il est reconnu par le droit objectif. Pour connaître
mon droit subjectif - par exemple, ai- je le droit de transformer cette chaise en
combustible pour allumer un feu - il faut que je me réfère au droit objectif - qui
dit que si je suis propriétaire de la chaise, je peux la brûler, alors que si je suis
usufruitier, je ne le peux pas. En résumé, le droit objectif « a un rôle d'habilitation »8
pour que les actes et les faits juridiques produisent leurs effets. Dans cet esprit
et avec une grande finesse psychologique, le doyen Cornu (1926-2007) part du
droit subjectif pour remonter au droit objectif. Il invite son lecteur à se poser une
7. Nous nous sommes toutefois autorisés à nous appuyer également sur trois introductions moins
contemporaines, celles de Carbonnier, Cornu, Marty et Raynaud.
8. B. Beignier, J.-R. Binet, A.-L. Thomat- Raynaud, Introduction au droit, 7e
2020, n° 296, p. 442-443.
éd., LGDJ, coll. Cours,

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