Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 15

Laetitia Guerlain
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nomme couramment « la doctrine »41
. Ce sont également des travaux sur les genres
littéraires des juristes qui ont modifié la façon d'appréhender les textes, grâce à un
travail sur l'écriture même du droit, nourri des travaux des littéraires42
.
Enfin, il faut relever l'important dynamisme de l'histoire des cultures juridiques,
à partir de la parution remarquée, en 2013, de l'ouvrage La culture
juridique française. Entre mythes et réalités (xixe
- xxe siècles) de Frédéric Audren et
Jean- Louis Halpérin. Les auteurs y décryptent les cultures juridiques à l'œuvre
dans la France post- révolutionnaire, entendues comme « un ensemble de valeurs,
de savoirs et de savoir- faire qui orientent, donnent sens et cohérence aux activités
des différents professionnels du droit »43
des auteurs, de mesurer le poids de la formation académique des juristes dans
« la structuration sociale des milieux juridiques »44
sance approfondie de l'histoire de l'éducation juridique était appréhendée comme
« la première voie d'accès à la connaissance [des différentes] cultures juridiques »
professionnelles45
. Il s'agissait notamment, de l'aveu
. Plus largement, une connais.
En procédant à une telle enquête, les deux auteurs, plutôt que
de postuler l'existence d'une culture juridique française qui se confondrait avec
une certaine tradition, entreprenaient au contraire d'en démonter les ressorts. Ils
démontraient ainsi que le mythe d'une culture juridique française était, au fond,
une invention des juristes du xxe
siècle soucieux de renforcer la légitimité et le
poids de la France face à la montée en puissance des droits de common law.
On aperçoit immédiatement l'importance de telles études sur l'histoire
des facultés de droit comme lieux d'inculcation de savoirs académiques pour
comprendre, au fond, que nous héritons moins passivement d'une tradition que
nous ne la construisons. Les différents travaux précités, dont la présente contribution
41. P.-N. Barenot, « De quelle pensée juridique faisons- nous l'histoire ? Réflexions autour de quelques
données bibliométriques », Clio@Themis. Revue électronique d'histoire du droit, n° 14 [L'histoire
de la pensée juridique : historiographie, actualité et enjeux], 2018 (https://www.cliothemis.com/
De- quelle- pensee- juridique- faisons).
42. Parmi une abondante historiographie, on se contentera ici de mentionner les travaux de Nader
Hakim : N. Hakim, « Les genres doctrinaux », in La doctrine en droit administratif, Litec, Paris, 2010,
p. 147-168 ; Id., « L'essai dans la littérature juridique française du xixe
Caen (dir.), Essai et essayisme en France au xixe
siècle », in P. Glaudes et B. Lyonsiècle,
Garnier, Paris, 2014, p. 171-187 ou encore,
récemment : Id., « Continuité ou rupture dans l'histoire de la pensée juridique ? Exégèse, transtextualité
et positivisme légaliste du Cours de Code Napoléon de Charles Demolombe », Revue d'histoire des facultés
de droit et de la culture juridique, t. hors- série [Liber amicorum. Mélanges réunis en hommage au professeur
Jean- Louis Thireau, dir. A. Dobigny- Reverso, X. Prévost et N. Warembourg], 2019, p. 171-210.
On signalera également l'ouvrage de V. Forray et S. Pimont, Décrire le droit... et le transformer. Essai
sur la décriture du droit, Dalloz, coll. Méthodes du droit, Paris, 2017.
43. F. Audren et J.-L. Halpérin, La culture juridique française. Entre mythes et réalités (xixe
- xxe siècles),
CNRS éditions, Paris, 2013, p. 8.
44. Ibid., p. 9.
45. Ibid., p. 10.
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