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Le droit objectif chez Duguit
s'épuise pas par son application dans un cas particulier45
». Mais Duguit ne cherche
nullement à faire de la loi un écrit immuable. À tel point qu'il écrit également
que « la loi constate le droit objectif, mais le droit objectif, tel qu'il est, c'est- à-dire
éternellement changeant46
». Dès lors, la loi éternellement fixe et universellement
applicable est une chimère.
La loi positive. - Cette référence à la loi incite à préciser ce que, justement,
Duguit entend par loi ou par loi positive. Le droit objectif ne se confond pas avec
la loi47
. Plus précisément, la législation est
. La notion de loi positive est apparue, selon lui, surtout pour protéger
l'individu contre l'arbitraire des gouvernants48
« l'acte par lequel les gouvernants constatent une règle de droit objectif. [...] quand
les gouvernants formulent une règle de droit dans une loi positive, ils ne créent
pas cette règle de droit, qui est antérieure et supérieure à eux ; ils ne peuvent que
la constater ; c'est pourquoi nous définissons la loi positive [comme] la constatation
d'une règle de droit objectif ; c'est pourquoi, en même temps, la loi positive
s'impose aux gouvernants comme aux gouvernés49
».
On en vient ainsi naturellement à la réponse à la question de départ : comment
limiter le pouvoir de l'État ? La limitation de l'État s'impose d'elle- même une
fois acceptée sa définition du droit objectif. Puisque le droit objectif repose sur le
fait que seul l'individu existe, l'État n'est que le groupement des dirigeants qui,
comme tout individu, ne peut agir efficacement que si son action est conforme
à la solidarité, au droit objectif. L'État n'est pas la source du droit, puisque, on
l'a vu, il est possible de définir la règle de droit, le droit objectif, sans passer par
l'État. L'État n'est pas dans la position du souverain qui peut décider de défaire
ce qu'il aurait fait. Il est soumis au droit50
. La protection contre l'arbitraire réside
45. L. Duguit, p. 525. Duguit aborde ainsi la question des lois temporaires. Adde. p. 538-539.
46. L. Duguit, p. 428.
47. L'auteur distingue également la loi positive de la norme. Voir p. 543 : la norme est, dans la loi, la
partie qui constate le droit objectif. Mais la loi peut inclure une autre partie, appelée constructive, qui
vise à assurer l'application de la loi (on pense à la sanction).
48. L. Duguit, p. 414.
49. L. Duguit, p. 422-423.
50. Génie pédagogique, Duguit offre souvent au cours de son ouvrage des résumés. En voici un qui
permet de relier tous les éléments entre eux à propos de la question de la limitation de l'État par le droit,
p. 349-350 : « la société est simplement une réunion d'hommes unis par la communauté des besoins et la
réciprocité des services rendus, la solidarité par similitudes et la solidarité par division du travail, qu'il y a
des individus qui pensent et qui veulent, et seulement des individus. Parmi eux des individus plus forts que
les autres peuvent et doivent employer la force matérielle dont ils disposent à la réalisation de la solidarité
sociale. Ces individus sont appelés gouvernants, et toute société où cette différenciation s'est produite
entre gouvernants et gouvernés est une société politique, un État si l'on veut. Ces gouvernants sont des
individus comme les autres, et leur volonté est une volonté individuelle, exclusivement individuelle ; et
non la volonté d'une prétendue personnalité collective qui n'existe nulle part. De droit de puissance,
de souveraineté, les gouvernants n'en ont pas plus que les gouvernés. [...] on a établi précédemment

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