Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 17

Laetitia Guerlain
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la culture juridique50
, les « grands auteurs »51
ou encore les « grands arrêts »52
.
. Ce
réflexe peut s'analyser comme une tendance naturelle, de la part des disciplines
savantes, à se doter d'une patristique commune ou encore de textes de référence
fondant une filiation partagée, à même de faire communauté53
Le statut de ces célébrations est pour le moins ambigu. Comme le relève
Frédéric Audren, ces différentes commémorations sont malaisées à situer, tant,
en fonction des auteurs, le ton oscille entre histoire et mémoire, hésite entre études
critiques et hagiographie, navigue entre témoignages et recherches à nouveaux
frais. Pour autant, elles n'en constituent pas moins, dans des proportions certes
inégales, l'occasion de moments importants d'autoréflexivité et autant d'occasions
d'avancées historiographiques54
. Le volume que le lecteur tient entre ses
mains, témoignant à sa manière de ce phénomène complexe, rappelle qu'histoire
et mémoire ne sauraient être frontalement renvoyées dos à dos, tant elles se
construisent dans un rapport mutuel55
.
Ni histoire, ni mémoire : qu'est- ce à dire ? À l'occasion de cet anniversaire, les
différents contributeurs - tous juristes privatistes et publicistes - étaient invités,
non pas à communier dans la remémoration a- réflexive de l'institution et de ses
« grands hommes », mais à procéder à une tentative d'évaluation du legs doctrinal
de quelques- uns des professeurs de droit ayant enseigné à la faculté de droit de
Bordeaux, depuis sa recréation en 1870. Déterminer ce qui, dans la doctrine
contemporaine, reste du passé, dans un geste de réactualisation de celui- ci : c'était
50. W. Mastor et al. (dir.), Les grands discours de la culture juridique, Dalloz, Paris, 2017 ; 2e
éd. 2020.
51. Ph. Malaurie, « Les " grands " juristes », in L'unité du droit. Mélanges en hommage à Roland Drago,
Economica, Paris, 1999, p. 79-89 ; N. Hakim et F. Melleray (dir.), Le renouveau de la doctrine française.
Les grands auteurs de la pensée juridique au tournant du xxe
siècle, Dalloz, 2009. Pour quelques exemples
de publications consacrées à la pensée juridique de « grands » auteurs, voir Hommage à Jean Carbonnier,
Dalloz, Paris, 2007 ; F. Melleray (dir.), Autour de Léon Duguit, Bruylant, Bruxelles, 2011 ; R. Verdier
(dir.), Jean Carbonnier : l'homme et l'œuvre, Presses universitaires de Paris Ouest, Paris, 2012 ; Hommage
à René David, Dalloz, Paris, 2012 ; O. Cachard, F.-X. Licari et al. (dir.), La pensée de François Gény,
Dalloz, Paris, 2012 ; P. Charlot (dir.), L'œuvre de Léo Hamon : thèmes et figures, Dalloz, Paris, 2012 ;
F. Mélin- Soucramanien et F. Melleray (dir.), Le professeur Jean Rivero ou la liberté en action, Dalloz, Paris,
2012 ; F. Audren et al. (dir.), Raymond Saleilles et au- delà, Dalloz, Paris, 2013 ; M. Touzeil- Divina (dir.),
Miscellanées Maurice Hauriou, l'Épitoge, Le Mans, 2013 ; X. Dupré de Boulois et Ph. Yolka (dir.), Léon
Michoud, Institut universitaire Varenne, Bayonne, 2014 ; C. Alonso (dir.), La pensée du doyen Hauriou
à l'épreuve du temps : quel(s) héritage(s) ?, PUAM, Aix- Marseille, 2015 ; E. Chevreau, F. Audren et al.
(dir.), Henri Lévy Bruhl, juriste sociologue, Mare & Martin, Paris, 2018.
52. Du nom de la fameuse collection des éditions Dalloz.
53. J. Boutier, J.-Cl. Passeron et J. Revel (dir.), Qu'est- ce qu'une discipline ?, Ed. de l'EHESS, Paris, 2006.
54. F. Audren, « Alma mater sous le regard de l'historien du droit... », op. cit.
55. Pour une recontextualisation de l'opposition entre histoire et mémoire, théorisée par Pierre Nora,
et une mise en lumière de ses enjeux, cf. l'analyse précieuse de S. Ledoux, « La mémoire, mauvais objet
de l'historien ? », Vingtième siècle. Revue d'histoire, n° 133, 2017/1, p. 113-128.
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