Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 31

Benoît Joyeux et Bernard Saintourens
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l'incidence sur l'attribution de la qualité d'associé, d'une part, du lien matrimonial
(A), et d'autre part, d'un démembrement de la propriété de droits sociaux (B).
A. Attribution de la qualité d'associé et communauté conjugale
Le point de départ de la contribution de l'œuvre doctrinale de Jean Derruppé
à propos de l'attribution de la qualité d'associé, attachée à la détention de parts
sociales ou d'actions, lorsque les personnes concernées sont mariées sous le régime
de la communauté, repose sur un constat, exprimé en ces termes : « l'expérience
des Cridon montre que tout n'est pas résolu dans ce domaine et qu'il subsiste des
incertitudes qui inquiètent la pratique notariale »26
. Sans qu'il soit ici opportun de
reprendre tous les points en discussion, on pourra mentionner que, compte tenu
de cette situation matrimoniale, les difficultés portaient, pour l'essentiel, lorsque
les apports faits à la société ont été effectués au moyen de biens communs, sur
l'attribution de la qualité d'associé à l'un ou l'autre des époux, sur la détermination
du propriétaire des droits sociaux et sur l'identification de la personne qui pourra
exercer, en tout ou partie, des droits attachés à cette qualité.
Jean Derruppé s'est attaché à, d'abord, exprimer clairement les éléments fondamentaux
en cause, sur le terrain juridique, et les enjeux, non moins importants
sur le terrain pratique. Pour reprendre l'approche synthétique que l'auteur avait
exprimée, le défi consistait à dépasser la contradiction qui existe entre le caractère
commun des droits sociaux, selon le régime matrimonial, et le caractère personnel
attaché à la qualité d'associé par le droit des sociétés. Pour sortir de cette contradiction,
Jean Derruppé reprend une distinction qui avait déjà été utilisée à propos
des offices ministériels, consistant à distinguer le titre et la finance, mais en lui
donnant, tout à la fois, un contenu plus solide et un libellé plus ajusté au problème
à résoudre. L'auteur établit alors un cadre doctrinal reposant sur la distinction
entre le titre d'associé et le bien patrimonial, les deux volets qui caractérisent la
propriété de parts sociales ou d'actions. Au résultat d'une solide argumentation,
Jean Derruppé retient qu'il convient de réserver le titre d'associé à l'époux qui se
présente comme apporteur et qui est accepté comme tel par ses coassociés, et de
considérer que les droits sociaux ainsi acquis étaient des biens communs en nature.
La consécration de cette construction doctrinale est venue du législateur lors
de l'adoption de la loi du 10 juillet 198227
. L'adhésion à l'analyse formulée par
26. J. Derruppé, « Régimes de communauté et droit des sociétés », Bulletin du Conseil supérieur du
Notariat, nov.-déc. 1970 ; étude reprise au JCP G 1971, 2403.
27. L. n° 82-596 du 10 juill. 1982 relative aux conjoints d'artisans et de commerçants travaillant dans
l'entreprise familiale.

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