Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 34

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Jean Derruppé : doctrine et pratique
B. Attribution de la qualité d'associé
et démembrement de droits sociaux
Dans une étape ultérieure de sa contribution doctrinale, Jean Derruppé a été
conduit à s'intéresser et à prendre position à propos de l'un des sujets de discorde
au sein de la communauté des juristes, qui demeure encore vif de nos jours. Dès
lors que les droits sociaux, parts sociales ou actions, peuvent faire l'objet d'un
démembrement de propriété, l'incidence de cette opération sur la reconnaissance
de la qualité d'associé suscite, en effet, de délicates interrogations.
Bien qu'en définitive très ancien, le questionnement sur la reconnaissance
au nu- propriétaire ou à l'usufruitier de droits sociaux (respectivement à l'un ou
à l'autre ou à chacun d'eux), de la qualité d'associé n'a été abordé, en doctrine,
qu'au cours des années de la décennie 1970. Dans la première édition du Mémento
Pratique Sociétés commerciales, publié par les Éditions Francis Lefebvre, ses auteurs,
Barthélémy Mercadal et Christophe Janin avaient pris, de manière prudente37
, la
position selon laquelle la qualité d'associé ne pouvait pas être reconnue à l'usufruitier,
au motif essentiel qu'il était étranger à la réalisation des apports, qui constitue
l'élément indispensable à l'octroi de cette qualité. Une position semblable a été
reprise et développée par Alain Viandier dans une thèse de doctorat qui fera date38
,
retenant également que le nu- propriétaire étant le seul apporteur, il doit détenir
seul la qualité d'associé et, en conséquence, disposer du droit d'intervenir dans les
affaires sociales qui y est attaché. Sans avoir totalement disparu des préoccupations
du milieu juridique, la question de la reconnaissance de la qualité d'associé en
cas de démembrement des droits sociaux a retrouvé un regain d'actualité principalement
à la suite d'arrêts de la Cour de cassation qui, sans prendre clairement
position sur ce point, ouvraient la porte à des interprétations opposées, chacun
des commentateurs faisant dire à l'arrêt ce qui convenait à sa propre conviction.
C'est à propos d'une décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation,
en date du 4 janvier 199439
, que Jean Derruppé s'est fortement impliqué
. Alors même que l'arrêt en cause se gardait bien
dans le débat, affirmant, selon son sens des formules efficaces, que l'usufruitier
est « un associé méconnu »40
de se prononcer sur la reconnaissance de la qualité d'associé à l'usufruitier et se
limitait à prohiber toute clause qui aurait pour effet de priver le nu- propriétaire
de sa participation aux décisions collectives, Jean Derruppé s'est engagé dans le
37. V. n° 117.
38. A. Viandier, La notion d'associé, LGDJ, 1978.
39. Cass. com., 4 janv. 1994, n° 91-20256, dit « arrêt De Gaste », du nom du demandeur au pourvoi.
40. J. Derruppé, « Un associé méconnu : l'usufruitier des parts ou actions », Rép. Not. Defrénois 1994,
p. 1137.
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