Manuel - Droit international privé - 8e - 89

Premiers repères
tard lorsqu'il s'est « concrétisé »321
. Elle a précisé ensuite, dans un arrêt ultérieur, que
l'adoption de l'enfant par le parent d'intention est une voie susceptible de respecter
les exigences de l'article 8 de la CESDH, au motif que «ce n'est pas imposer aux
enfants concernés un fardeau excessif que d'attendre des requérants qu'ils engagent (...)
une procédure d'adoption »322
. Dans un autre arrêt, elle a maintenu la même position
.
àl'égard d'une mère d'intention qui était également la mère génétique de l'enfant323
Au vu de cet avis de la CEDH, la Cour de cassation, statuant sur l'ultime épisode
de l'affaire Mennesson qui en était à l'origine dans le cadre de la nouvelle procédure
de réexamen des décisions civiles rendue en matière d'état des personnes324
,a jugé
que « s'agissant d'un contentieux qui perdure depuis plus de 15 ans, en l'absence d'autre
voie permettant d'établir la filiation dans des conditions qui ne porteraient pas une
atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée des deux enfants », la transcription
de l'acte de naissance, y compris de ses mentions relatives à la filiation de
l'enfant à l'égard de la mère d'intention, devait être effectuée sur les registres de
l'état civil français325
affaires moins iconiques326
. La même solution fut rééditée deux mois plus tard dans des
alors que l'utilisation de la voie de la transcription y
paraissait moins nécessaire.
Cette ultime avancée, néanmoins, semble condamnée par la nouvelle rédaction
de l'article 47 du Code civil résultant de la loi du 2 août 2021 relative à la
bioéthique327
, car la précision selon laquelle la réalité des faits mentionnés dans un
acte de l'état civil étranger doit être « appréciée au regard de la loi française »paraît
destinée à éviter que les mères biologiques soient occultées au bénéfice des parents
d'intention. Hors l'hypothèse du père génétique, ces derniers seraient donc à nouveau
invités à se tourner vers l'adoption, qui ne leur avait d'ailleurs pas été
fermée328
.
86. Ces incertitudes incitent à envisager la filiation d'intention des enfants
nés d'une GPA réalisée à l'étranger en prenant une certaine distance par rapport
à un droit positif en pleine effervescence. Une alternative se dessine
alors, dont les deux branches peuvent être présentées de la manière suivante :
« reconnaissance » du lien de filiation établi à l'étranger ou « reconstruction »329
321. CEDH, avis, 10 avr. 2019, nº P16-2018-001.
322. CEDH, 12déc. 2019, C. c/France et E. c/France, nº 1462/18 et 17348/18.
323. CEDH, 20juill. 2020, D. c/France, nº 11288/18.
324. Créée par la loi dite J21, cette procédure est désormais réglementée : COJ, art. L. 452-1 et s. et CPC,
1031-8 et s. Les époux Mennesson, dont le succès strasbourgeois n'avait encore aucune traduction concrète
en France en raison du caractère irrévocable de l'arrêt de 2011 ayant refusé la transcription des actes de
naissance (Cass. 1re
civ., 6 avr. 2011, nº 10-19053, préc.), avaient naturellement vocation à en bénéficier.
325. Cass. ass. plén., 4 oct. 2019, nº 10-19053, Gaz. Pal., 7janv. 2020, p. 86, I. Rein-Lescastéreyres et
M.-L. Niboyet ; JDI 2020, comm. 8, note J. Heymann et F. Marchadier.
326. Cass. 1re
D. Sindres. Cette solution a été plusieurs fois réaffirmée depuis, voir not. Cass. 1re
nº 19-50043, et 13janv. 2021, nº 19-17929.
327. Sur celle-ci, voir supra, nº 32.
328. Cass. 1re
civ., 4 nov. 2020, nº 19-15739 et nº 19-50042.
329. H. FULCHIRON et C. BIDAUD-GARON, « Reconnaissance ou reconstruction ? À propos de la filiation des
enfants nés par GPA, au lendemain des arrêts Labassée, Mennesson et Campanelli-Paradiso de la Cour
européenne des droits de l'homme », RCDIP 2015, p. 1, qui incluent dans le périmètre de leur réflexion
les pères d'intention qui sont également pères génétiques.
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civ., 18 déc. 2019, nº 18-11815 et nº 18-12327 (pères d'intention), JDI 2020, comm. 9, note
civ., 18 nov. 2020,
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