Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 76 - La responsabilité juridique à l'épreuve de la gestion - 202

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LA RESPONSABILITÉ JURIDIQUE À L'ÉPREUVE DE LA GESTION
et de programmation sur la sécurité intérieure11,« le Conseil ne répondit pas sur la
question de la bonne utilisation des deniers, mais raisonna seulement par rapport à
d'autres principes »12.
459. Le Conseil constitutionnel a finalement affirmé que le « bon usage des
deniers publics » constituait une exigence de valeur constitutionnelle, pour la première
fois, dans sa décision du 29 décembre 2003 relative à la loi de finances pour
200413.L'article 117 de la loi de finances prévoyait que : « Les collectivités territoriales
et leurs établissements publics informent l'État avant toute opération affectant le
compte du Trésor. Les seuils et les conditions de mise en œuvre de cette obligation
d'information préalable sont fixés par décret en Conseil d'État »14. Les saisissants
estimaient que cette disposition portait atteinte aux principes de « libre administration
» des collectivités territoriales et de la « libre disposition de leurs
ressources »15. Contrairement aux affaires précédentes, le Conseil va réaliser un
contrôle du « bon usage » alors même qu'il n'y était pas invité par les requérants.
460. En effet, le Conseil considère que « l'obligation d'information préalable
[...] a pour objet, grâce à une meilleure anticipation des opérations importantes
affectant le compte du Trésor, d'améliorer la gestion de la trésorerie de l'État en
utilisant defaçon plus active lesfonds déposés auprès de lui par les collectivités territoriales
et leurs établissements publics ; que, cefaisant, elle participe au bon usage
des deniers publics, qui est une exigence de valeur constitutionnelle »16. Il ajoute que
l'information préalable doit permettre également « d'éviter que le solde du compte du
Trésor puisse être débiteur, et de respecter ainsi l'article 101 du Traité instituant la
Communauté européenne qui interdit à la Banque de France d'accorder des avances
à des organismes publics »17. Il en conclut que « le législateur a opéré, entre les
objectifs ainsi définis et les principes invoqués par les requérants, une conciliation
qui n'apparaît pas manifestement déséquilibrée »18. Il résulte de cette décision que
le « bon usage des deniers publics » est une « exigence » qui doit être conciliée avec
les principes de libre administration et de libre disposition des ressources. Le législateur
peut être amené à porter atteinte à ces derniers dès lors que l'objectif le commande
(contrôle de proportionnalité).
461. La reconnaissance de la valeur constitutionnelle du « bon usage » a permis
au Conseil d'en étendre le champ d'application, son contenu n'étant pas encore
stabilisé19. Cette exigence dépasse le cadre étroit de la simple régularité des dépenses
11. Décision nº 2002-460 DC du 22 août 2002 relative à la loi d'orientation et de programmation sur
la sécurité intérieure (considérants 4 et suivants).
12. BOITEUX D., Le bon usage des deniers publics, op. cit., p. 1099.
13. Décision nº 2003-489 DC du 29 décembre 2003 relative à la loi de finances pour 2004.
14. Décision nº 2003-489 DC du 29 décembre 2003 relative à la loi de finances pour 2004, op. cit.,
considérant 29.
15. Ibid. (considérant 30).
16. Ibid. (considérant 33).
17. Décision nº 2003-489 DC du 29 décembre 2003 relative à la loi de finances pour 2004 (considérant
33).
18. Ibid.
19. Dans un arrêt rendu en 1971, le Conseil d'État avait fait implicitement application d'un principe
de protection des deniers publics : CE, Sect., 19 mars 1971, Sieur Mergui, Rec. p. 235 (« Cons. Que
les personnes morales de droit public ne peuventjamais être condamnées a payer une somme qu'elles ne
doivent pas ; que cette interdiction est d'ordre public et doit être soulevée d'office par la juridiction

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