Bibliothèque de droit public - Tome 328 - L'intérêt général en économie de marché - 189

LE DROIT EUROPÉEN DES CONTRATS PUBLICS LIMITE LES « PRIVILÈGES »
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souplesse pour ce qui est de quelques aspects de l'activité contractuelle publique. La
reconnaissance de la nécessité de permettre aux pouvoirs adjudicateurs de choisir les
modalités de passation des concessions (I) ou encore le fait de leur accorder la possibilité
de percevoir les contrats publics comme instruments d'élaboration de politiques
publiques (II) constituent les exemples les plus caractéristiques de cette approche.
I. LA RECONNAISSANCE AUX AUTORITÉS CONTRACTUELLES
D'UNE MARGE D'APPRÉCIATION LIMITÉE QUANT AU CHOIX
DES PROCÉDURES DE PASSATION DES CONCESSIONS
328. Comme nous l'avons déjà évoqué, initialement le régime européen des
concessions était éclaté. Les concessions de travaux étaient soumises non seulement
aux principes du traité, et notamment à celui de non-discrimination, mais également,
assez rapidement108, aux dispositions leur étant consacrées au sein des directives marchés
et introduisant à leur égard une obligation de publicité109, alors que les concessions
de services sont restées pendant très longtemps et jusqu'àl'adoption de la directive
2014/23/UE sous la seule emprise des principes du traité. Pour cette dernière
catégorie de concessions notamment, mais à un moindre degré pour les concessions
de travaux également, et jusqu'àl'introduction du « paquet » de directives de 2014
portant sur les contrats publics, la mise en œuvre effective des principes du traité
reposait presque uniquement sur la façon dont les autorités compétentes de chaque
État membre interprétaient en la matière le principe de loyauté, toujours sous le
contrôle du juge mais sans la garantie qu'offre un cadre juridique plus détaillé, précis
et rigoureux, ne laissant pas de larges marges d'appréciation.
329. Certes, la jurisprudence de la Cour, notamment depuis l'arrêt Telaustria110
avait déjà esquissé d'une façon plus précise des obligations procédurales essentielles
visant à garantir la mise en œuvre effective des principes du traité pour ce qui est du
choix du cocontractant. Néanmoins, le caractère casuistique de cette solution la rendait
moins efficace sur le plan général et ne permettait pas de circonscrire considérablement
l'insécurité juridique qui régnait en la matière.
330. La nouvelle directive améliore la visibilité et l'efficacité du cadre juridique
régissant les deux catégories de concessions, en renforçant les contraintes imposées
aux pouvoirs adjudicateurs ou aux entités adjudicatrices en matière de passation des
contrats111. Pourtant, la version finale de la directive n'a pas suivi la logique du projet
initial de la Commission qui introduisait des procédures formalisées à l'instar du
régime applicable aux marchés publics. Les réticences des États qui ont vu dans ce
projet une approche inadaptée aux spécificités des contrats de concession, ont fait que
dans la version finale de la directive nous ne trouvons que des principes généraux et
des « garanties de procédure » au lieu d'une consécration d'une « procédure de passation
standard »112, choix ouvrant ainsi la voie à une certaine flexibilité du cadre
108. V. directive 89/440/CEE du 18juillet 1989 modifiant la directive 71/305/CEE portant coordination
des procédures de passation des marchés publics de travaux.
109. Mais non pas une obligation de concurrence.
110. CJCE, 7 décembre 2000, aff. C-324/98, Telaustria Verlags GmbH et Telefonadress GmbH, Rec.
2000, p. I-10745.
111. Mais aussi pour ce qui est de leur exécution.
112. HOEPFFNER H., La nouvelle directive Concessions. Sécuriser le cadre juridique des concessions
etpréserver la liberté des concédants : une conciliation impossible ?, Europe, no 6, juin 2014, étude 5.

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