Les dictionnaires LGDJ - Dictionnaire des modes alternatifs de résolution des conflits - 1re - 85

AR B I T R AG E ( N O T I O N )
en dernier : l'arbitre en ligne. Dès lors que l'arbitrage
en ligne se développe, il faut s'y intéresser.
En réalité, malgré la nouveauté des
moyens utilisés, l'arbitrage en ligne ne pose
pas de problèmes réellement inédits, à l'instar
de ce qu'il en est pour les autres questions
juridiques confrontées à Internet. Qu'il ne soit
compétent que pour les litiges nés sur Internet
ou qu'il décide de trancher un litige classique
en utilisant Internet, l'arbitre en ligne
n'en reste pas moins un arbitre. La seule différence
est qu'il utilise des moyens modernes
pour résoudre le litige. Cet arbitre n'a de virtuel
que le nom. Malgré les progrès de l'intelligence
artificielle et de la justice prédictive, le
temps de l'arbitre-robot n'est pas encore arrivé.
La
mission juridictionnelle est donc au cœur
de la notion d'arbitrage, ce qui revient à
s'interroger sur le fait qu'il figure dans le présent
Dictionnaire dont l'objet porte sur les modes
alternatifs de règlement des conflits. En
quoi l'arbitrage est-il alternatif à la justice
puisqu'il est justement une justice ?
En réalité, la question consiste à se demander
ce que signifie exactement cette alternative.
S'il s'agit d'une alternative à la justice étatique,
alors l'arbitrage est un MARC. Mais s'il
s'agit d'une alternative à la justice, alors l'arbitrage
n'est pas un MARC.
La réponse à cette question dévoile une certaine
conception du droit et de l'ordre juridique.
Ramener l'arbitrage aux modes purement
contractuels revient avant tout à faire
de l'arbitre un tiers choisi par les parties. Au
contraire, apparier l'arbitrage à la justice étatique
a pour conséquence de considérer l'arbitre
avant tout comme un juge, et, partant, à
se revendiquer davantage du pluralisme juridique
que du positivisme légaliste. Or, dans
la conception française, l'arbitrage est une
justice à part entière et l'arbitre un juge, privé
certes, mais juge. Il y a beaucoup plus en
commun entre le juge étatique et l'arbitre
qu'entre celui-ci et le médiateur ou le conciliateur.
La vraie ligne de départage se situe, non
pas dans l'origine étatique ou conventionnelle
de la mission, qui finalement importe peu pour
qui doit exécuter la décision, mais entre les
modes contractuels et les modes juridictionnels,
dussent-ils procéder d'un contrat. La
source du pouvoir compte moins que l'effet
de la décision. Le jugement et la sentence arbitrale
ont ceci en commun qu'ils s'imposent,
alors que le résultat d'une médiation ou d'une
conciliation, qui peut prendre la forme d'une
transaction, est toujours le produit d'un accord.
D'un côté, une solution imposée, de l'autre
une solution négociée. La césure est donc
bien entre, d'un côté, les modes juridictionnels
et, de l'autre, les modes conventionnels.
La source privée de l'investiture de l'arbitre
est-elle de nature à altérer l'effet juridictionnel
de sa décision ? L'arbitre serait-il un ersatz de
juge ? Une sorte de juge au rabais ?
Les quatre mille ans d'histoire de l'arbitrage et
le développement exponentiel de celui-ci, valable
désormais dans tous les contrats pour
les droits desquels les parties ont la libre disposition,
conduisent à répondre par la négative.
Ne
percevoir l'arbitre qu'en tant que diminutif
du juge, c'est forcément ne concevoir l'arbitrage
qu'en tant que justice dérivée à la justice
étatique. Cette optique est révélatrice
d'une vision que l'évolution contemporaine de
l'arbitrage contredit chaque jour davantage : il
est de moins en moins une justice alternative,
et de plus en plus une justice appropriée.
L'arbitre exerce la fonction d'un véritable juge
et non celle d'un simple mandataire des parties,
la sentence arbitrale est un véritable jugement,
et l'arbitrage est une véritable justice.
Mais une justice que les parties peuvent
façonner au plus près des caractéristiques de
leur litige.
II. Variations : la flexibilité
des formes de l'arbitrage
L'arbitrage, en tant que mode de résolution
d'un conflit, peut prendre diverses formes.
Toutefois, il y a une donnée essentielle sur laquelle
les parties, pourtant sources d'impulsion
de l'arbitrage, n'ont aucun pouvoir :
l'internationalité de l'arbitrage. En effet, dans
un système juridique comme le droit français,
où l'arbitrage a su acquérir une place de choix
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