Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°4-2022 - 82

INVESTMENTS CHRONICLE
a) Sur la distinction entre compétence et recevabilité
7. Le 31 mars 2021, la Cour de cassation a censuré l'arrêt de la Cour d'appel
de Paris du 29 janvier 2019 dans l'affaire Venezuela c/ Rusoro Mining 111
. Comme il a été exposé dans cette chronique 113
par
lequel la juridiction parisienne avait annulé la sentence rendue le 22 août 2016
par un tribunal arbitral constitué sur le fondement du TBI Canada-Venezuela
(1996) 112
, l'article XII(3) du TBI
Canada-Venezuela disposait que « l'investisseur peut soumettre un différend à
l'arbitrage » si, entre autres, « trois ans ou moins se sont écoulés depuis la date à
laquelle l'investisseur a pris connaissance ou aurait dû prendre connaissance pour
la première fois de la prétendue violation ainsi que de la perte ou du préjudice
qu'il a subi » 114
. Ayant relevé que le tribunal arbitral avait « intégré à la réparation
du préjudice consécutif à l'expropriation de 2011 l'indemnisation de celui qui
résulte des mesures de 2009 », la Cour d'appel de Paris avait estimé que le tribunal
arbitral n'avait pas respecté l'étendue de sa compétence temporelle et, avait ainsi
procédé à l'annulation partielle de la sentence du tribunal arbitral en ce qu'elle
condamne l'État à verser la somme ainsi déterminée 115
.
8. La Cour d'appel avait ainsi conclu que le délai de prescription prévu à
l'article XII(3) du TBI relevait de la compétence temporelle du tribunal arbitral.
Or, c'est cette interprétation que la Cour de cassation est venue censurer par son
arrêt du 31 mars 2021. La Cour de cassation a observé que le délai de prescription
constitue non pas une exception d'incompétence, comme l'avait retenu la Cour
d'appel de Paris, mais une question relative à la recevabilité des demandes devant
le tribunal arbitral, question qui ne relève pas de l'article 1520(1) du CPC et qui
échappe nécessairement au contrôle de la juridiction d'annulation 116
. Saisie sur
renvoi après cassation, la Cour d'appel de Paris autrement constituée a, par un
arrêt du 7 juin 2022, rejeté le recours en annulation formé contre la sentence
du tribunal, jugeant à l'instar de l'arrêt de la Cour de cassation, que le délai de
prescription énoncé à l'article XII du TBI ne peut s'assimiler à une condition
du consentement des parties, et donc à une question relative à la compétence
du tribunal, mais constitue une condition relative à la recevabilité des demandes
formées devant le tribunal arbitral régulièrement investi 117
.
b) Sur le consentement des parties à l'arbitrage
9. Le 17 novembre 2020, la Cour d'appel de Paris s'est prononcée sur un
recours en annulation formé par la Libye à l'encontre de la sentence partielle rendue
le 20 décembre 2017 dans le cadre de l'affaire Sorelec par laquelle le tribunal
arbitral s'était déclaré compétent à homologuer un protocole d'accord conclu entre
111. Cour de cassation (Civ. 1re
), 31 mars 2021, 19-11.551, Bull. civ., 2021, n° 3, p. 66, Revue
de l'arbitrage, 2021, p. 709-718, note Audit M.
112. Cour d'appel de Paris, RG n° 16-20822, 29 janvier 2019.
113. Voir dans cette chronique le commentaire de Crépet-Daigremont C., op. cit., § 9.
114. Voir Cour de cassation (Civ. 1re
115. Ibid., p. 69, § 7.
116. Ibid., p. 69, § 8.
117. Cour d'appel de Paris, RG n° 21/10427, 7 juin 2022.
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The Paris Journal of International Arbitration 2022‑4
), 31 mars 2021, 19-11.551, Bull. civ., 2021, n° 3, p. 68, § 7.
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