Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 359

Ch a p i tre 5 - La p r otec t i on de l a pe r s o nn a l i t é du mal ade
médicaux, au motif que le délit « suppose un acte positif de divulgation, lequel n'a nullement
été établi à l'encontre des prévenus »58
.
530 Indiscrétions verbales ou écrites. - Le juge pénal a, en revanche, adopté une conception
plus large du délit de violation du secret professionnel s'agissant des modalités par
lesquelles le confident indiscret peut trahir le secret. En effet, puisque le texte de
l'article 226-13 du Code pénal ne précise pas les formes de la révélation, il faut en
déduire que toute révélation écrite ou verbale peut consommer matériellement l'infraction.
Le médecin peut donc tout d'abord être sanctionné pénalement pour avoir été
l'auteur d'une révélation orale. Le praticien qui dévoile par la parole un secret est par
conséquent susceptible d'être poursuivi que cette révélation intervienne dans le cadre
d'un témoignage officiel ou de tout autre bavardage.
A fortiori, la révélation qui intervient sous forme écrite tombe également sous le coup de
la loi quelle que soit la forme de l'écrit. La pratique judiciaire montre que c'est cette
forme de révélation qui expose le plus les médecins à une poursuite pour violation du
secret professionnel car le corps médical est très sollicité pour la délivrance d'attestations
ou de certificats médicaux. La plume du médecin peut être déterminante dans une
affaire au regard de la confiance qu'inspire la profession, et l'on ne saurait s'étonner
que l'écrit du praticien soit tant convoité par les tiers, les assureurs, les employeurs,
voire l'administration, notamment fiscale. Dans tous les cas, la jurisprudence n'exige
pas que le médecin indiscret ait cherché à diffuser l'information dévoilée notamment
par publication ou voie de presse pour entrer en voie de condamnation. Il suffit donc
que le médecin ait transcrit l'information secrète dans un écrit qui a été effectivement
consulté au moins une fois par un tiers pour que la révélation devienne punissable. Il
est évident enfin que ces révélations écrites sont punissables quel que soit le support
écrit qui constitue l'instrument du délit. On songe aujourd'hui notamment aux réseaux
sociaux - Facebook et autre Twitter - qui peuvent particulièrement exposer les médecins
adeptes du post et du tweet. L'actualité la plus récente a ainsi fait état d'un médecin qui
se proposait de vendre aux enchères la radio d'une blessée des attentats du Bataclan du
13 novembre, sur laquelle on voit une balle de kalachnikov. Nul doute qu'un tel procédé
constitue une révélation punissable, laquelle peut donc se commettre « tant par le poids
des mots que par le choc des photos, et donc des radiographies »59
.
531 Indiscrétions envers autrui. - La violation du secret professionnel ne se conçoit que si
la révélation de l'information s'effectue à autrui. Il n'y a donc pas de délit lorsque la révélation
est faite à l'intéressé lui-même. En revanche, dès que la révélation est faite à un
tiers à la relation professionnelle qui unit le médecin au malade, l'infraction est constituée.
Cela signifie que des attestations ou certificats médicaux peuvent être délivrés et
utilisés s'ils sont remis au malade lui-même et sur sa demande. Mais si ces documents
sont établis directement aux tiers sans consentement des personnes bénéficiaires du
secret, l'atteinte à l'intimité du patient est patente et la condamnation du praticien
devient possible, par exemple lorsque la révélation s'effectue au profit d'un assureur
ainsi qu'il a déjà été souligné60
.
Quant à l'identification du tiers qui peut servir d'objet à la révélation du secret, le juge
pénal a sur ce point une conception très large de l'infraction qui lui permet de reprocher
la révélation y compris dans la sphère familiale du malade ou à l'égard de son entourage.
(58) Cass. crim., 30 oct. 2001, nº 99-82136.
(59) B. PY, « Le radiologue cupide, la blockchain et la violation du secret professionnel », Revue Droit & Santé, 2022,
nº 107, p. 317. Le parquet a en l'espèce requis contre le médecin une peine d'un an d'emprisonnement avec
sursis, une amende de 15 000 euros et une interdiction d'exercice d'une durée d'un an. « Prison avec sursis requise
pour celui qui voulait vendre la radio d'une rescapée », 20Minutes, 28 septembre 2022, https://www.20min.
ch/fr/story/prison-avec-sursis-requise-pour-celui-qui-voulait-vendre-la-radio-dune-rescapee-126620434139
(60) T. corr. Paris, 10 mai 1999, préc.
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