Les Intégrales - Droit pénal médical - 2e - 464

DROIT PÉNAL MÉDICAL
Certains arrêts enfin condamnent des prévenus qui exploitent les différents critères de
vulnérabilité listés par le Code pénal. Tel est le cas de ce pseudo-praticien se prétendant
médium, sophrologue et magnétiseur qui avait profité de son aura pour commettre des
abus de faiblesse fructueux auprès de deux personnes vulnérables, l'une en raison de
son âge et de ses faiblesses psychologiques, qui confondait en 2002 les euros et les
francs, et l'autre en raison de son état de santé94
.
En toute hypothèse, qu'elle soit due à l'âge, à la maladie, à une infirmité, à une déficience
physique ou psychique ou à un état de grossesse, cette particulière vulnérabilité
de la victime n'a pas à être spécialement connue du médecin, il suffit qu'elle soit au
moins apparente. Les cas qui ont servi de support en jurisprudence pour condamner des
médecins montrent cependant que, le plus souvent, la victime étant un des patients du
praticien, l'état de vulnérabilité était effectivement connu. Mais on peut parfaitement
imaginer qu'un médecin puisse, grâce à ses compétences professionnelles, découvrir un
cas de particulière vulnérabilité apparent au-delà de sa patientèle et s'en servir pour
abuser le malade ou la personne vulnérable.
730 L'acte abus. - Précis sur la victime du délit, le Code pénal est, en revanche, très flou
sur la matérialité même de l'infraction, ce que l'on peut regretter. Il se contente en effet
de sanctionner l'abus de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse. Cela étant, il
n'est pas difficile de cerner la notion d'abus, car, comme l'indique la doctrine, « abuser,
c'est profiter d'une situation, en l'espèce de faiblesse, pour en retirer des avantages
indus »95
.L'hypothèse de prédilection du délit est donc celle où la victime va être
trompée en raison de sa situation d'ignorance ou de faiblesse que le médecin va exploiter
en toute perfidie. Et le médecin est alors condamné pour avoir réalisé un profit injustifié
au regard des circonstances. Tel est le cas lorsque le praticien, qui connaissait la vulnérabilité
de ses patients, obtient d'eux, en endormant leur méfiance et en leur dissimulant
sa situation d'insolvabilité, le prêt de diverses sommes provenant d'une indemnité de
licenciement et d'un héritage dont lui-même avait appris l'existence lors d'une
consultation96
.L'acte d'abus peut également consister de la part du médecin, en tirant
ou tout simplement à se faire remettre
profit de la situation de vulnérabilité ou de faiblesse, à obtenir la signature d'un acte de
vente, sous conditions suspensives, d'un terrain97
des sommes d'argent parfois substantielles98
. Ainsi en est-il, dans cette affaire récente où
un médecin traitant s'était fait remettre par sa patiente âgée de plus de 90 ans et
malade, des chèques pour un montant total de plus de 97 000 euros, des espèces tirés
de son compte pour un montant de plus de 45 000 euros et du matériel médical pour
un montant de près de 13 000 euros. Elle avait même récupéré les meubles de valeur
qui garnissaient l'appartement de sa patiente et, bénéficiant d'une procuration, elle
avait procédé à la vente de son studio. In fine, en cinq ans, ses avoirs bancaires avaient
diminué de 304 898 euros99
.
731 Conséquences de l'abus. - S'agissant des conséquences de l'abus, le texte d'incrimination
est à la fois précis et peu exigeant. L'article 223-15-2 du Code pénal sanctionne
en effet l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse lorsqu'il est
effectué « pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui
lui sont gravement préjudiciables ». On observe par là même tout d'abord que l'infraction
est formelle. « Conduire à » n'implique pas que le résultat redouté, à savoir l'acte ou
l'abstention, ait été effectivement atteint. Il suffit donc que le médecin ait agi pour
(94) CA Montpellier, 5 nov. 2008, nº 08/01164.
(95) V. MALABAT, Droit pénal spécial, préc., nº 296.
(96) Cass. crim., 5 oct. 2004, nº 02-8522, préc.
(97) Cass. crim., 12 janv. 2000, nº 99-8105, préc.
(98) CA Montpellier, 5 nov. 2008, préc.
(99) CA Paris, 29 juin 2012, nº 11/09264, JurisData nº 2012-019819.
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http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=99-8105 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=99-8105
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