Cours - Droit de la peine - 2e - 463

Le prolongement de la peine par les mesures de sûreté
A. La définition
881 Privation de liberté. Alors que le condamné s'est acquitté de sa dette envers la société par l'exécution
de sa peine, le législateur valide, en créant cette mesure de sûreté, une nouvelle forme de privation
de liberté, aux fins de prévention de la récidive, d'unepersonnequi, n'ayant pas encore commis de
nouvelle infraction, recèle intrinsèquement une forte probabilité d'en commettre une si elle était remise
en liberté.
La définition de la rétention de sûreté est livrée au dernier alinéa de l'article 706-53-13 du Code de
procédure pénale. Elle consiste « dans le placement de la personne intéressée en centre sociomédico-judiciaire
de sûreté dans lequel lui est proposée, de façon permanente, une prise en charge
médicale, sociale et psychologique destinée à mettre fin à cette mesure ».
882 Nature et régime. Si elle a bien la nature de mesure de sûreté car elle poursuit une finalité
préventive et non répressive selon la distinction opérée par le Conseil constitutionnel dans sa décision
nº 2008-562 du 21 février 2008, la rétention de sûreté a la particularité d'être la première mesure de
sûreté privativedeliberté quenotre droit a consacréeet serapproche pour cetteraison dela détention
de sûreté allemande69
. En raison de ses effets drastiques, le Conseil constitutionnel, en se fondant sur
l'article 9 de la DDHC, lui applique les garanties traditionnellement attachées à la peine privative de
liberté. Elle ne peut notamment s'appliquer de manière rétroactive, suivant en cela les règles applicables
aux lois de pénalité nouvelles plus sévères70
.
883 Placement en centre socio-médico-judiciaire de sûreté71
. La personne faisant l'objet d'une rétention
de sûreté est ainsi placée sous contrainte dans une structure spécialement créée à cet effet : le
centre socio-médico-judiciaire. Avec le décret nº 2022-479 du 30mars 2022 portant création du Code
pénitentiaire, les dispositions relatives aux centres socio-médico-judiciaires initialement contenues
dans le Code de procédure pénale ont été transférées dans ce nouveau code72
. Le centre sociomédico-judiciaire
est une structure placée sous l'autorité conjointe du ministre de la Santé et du
ministre de la Justice accueillant des personnes faisant l'objet d'une rétention de sûreté. Les établissements
sont placés sous la direction conjointe, chacun dans son domaine de compétence, d'un directeur
des services pénitentiaires et d'un directeur d'établissement de santé public. Ce double rattachement
permet d'insister sur le fait qu'il ne s'agit pas que d'une simple neutralisation de la personne, celle-ci
devant recevoir un traitement médical. À ce titre, la prise en charge peut notamment comporter,
après accord écrit de la personne, un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution
de la libido. Lesdits établissements ont pour mission : 1ºde proposer à ces personnes, de façon
permanente, une prise en charge médicale, psychologique et sociale destinée à réduire leur dangerosité
et à permettre de mettre fin à la mesure de rétention ; 2ºde retenir dans leurs locaux ces personnes,
dans des conditions permettant d'assurer la sécurité et le bon ordre du centre socio-médico-judiciaire
et d'éviter que ces personnes ne se soustraient à la mesure prononcée, avec la rigueur strictement
nécessaire et dans le respect de leur dignité73
. Bien que le législateur français s'en défende, le centre
69. V. supra,nº 27.
70. Cons. const., 21 févr. 2008, nº 2008-562 DC.
71. M. HERZOG-EVANS,« Les textes d'application de la loi rétention de sûreté. L'enracinement des nouvelles orientations de l'exécution des peines »,
D. 2008,chron.3098.
72. C. pénit., art. R. 541-1 et s.
73. C. pénit., art. R. 541-2.
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