Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023 - 15

DOSSIER - LES POLITIQUES PUBLIQUES : UN CHOIX LIBANAIS ?
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port de Beyrouth (CEGPB) (16). Parmi ses actionnaires, on peut citer Henri
Pharaon, Sami Maroun, les frères Badaoui, la famille Baltaji, des hommes
d'affaires et des banquiers soutenus par des capitaux français, majoritairement
issus de la communauté maronite et étroitement liés à la sphère politique. La
guerre civile impacte fortement le port et sa gestion. La milice des Forces
libanaises dirigée par Samir Geagea contrôle pendant un temps le 5e
bassin
disposant d'un atout important dans une économie de guerre florissante. Par
ailleurs, le conseil de la CEGPB est investi par les chefs des milices, nouveaux
seigneurs de la guerre, qui obtiennent des concessions d'exploitations
de plus d'une vingtaine de ports pour l'acheminement de leurs armes et leur
contrebande. Les milices contrôlant ce secteur se partagent les revenus et
l'État perd de son influence. Avec la fin de la guerre, le port revient à l'État,
mais les pratiques miliciennes perdurent et les querelles pour le contrôle de
l'administration de ce secteur reprennent, d'autant que la concession de 30 ans
pour la CGEPB arrive à son terme. L'ancienne garde mercantile est remplacée
par les miliciens devenus députés ou ministres, secondés par une nouvelle
classe entrepreneuriale portée par le Premier ministre Rafic Hariri arrivé au
pouvoir en 1993. Ce dernier va procéder à la privatisation du centre-ville et
d'une partie du port en créant la Société libanaise pour le développement et
la reconstruction (SOLIDERE) (17). En privatisant le centre-ville, Hariri ôte
une série de prérogatives publiques, notamment dans la planification urbaine
ou la supervision de la construction d'infrastructures. Par ailleurs, cette société
privée en charge de l'administration du centre-ville est cotée à la bourse de
Beyrouth. L'ère Hariri est aussi marquée par la généralisation de la pratique
de répartition (muhassassa) dans les institutions qui consiste à accorder une
part du pouvoir et des bénéfices, aux différents partis et communautés rattachés
soit au président de la République, au chef du Parlement ou au Premier
ministre (la Troïka). Chaque groupe, chaque acteur, se partage les ressources
du pays, les recettes publiques et les projets d'investissements. Ne trouvant pas
d'accord pour un statut commun pour l'administration du port, en mars 1993,
une Commission transitoire (CT) dépendant du ministère des Travaux publics
et des Transports, dans laquelle siègent tous les représentants des différentes
organisations politiques ou financières, est née. Le caractère provisoire de
cette commission dure jusqu'aujourd'hui et la gestion du port, intrinsèquement
dépendante des luttes de pouvoir entre les différents groupes et acteurs, met
(16) Babikian C., « Le port de Beyrouth : de la gestion par une compagnie privée à
capitaux français à la libanisation », RDP 2022, p. 1593 et s.
(17) La réglementation de la reconstruction de Beyrouth est décidée par le
décret n° 4830 du 4 mars 1994 et son amendement n° 5609 du 3 septembre 1994.
V. El Achkar E., Réglementation et formes urbaines : le cas de Beyrouth, 1998,
Beyrouth, Presses de l'IFPO, nouvelle éd., 2022, http://books.openedition.org/
ifpo/4315, https://doi.org/10.4000/books.ifpo.4315.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 1-2023
http://books.openedition.org/ https://www.doi.org/10.4000/books.ifpo.4315
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