Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023 - 234

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DOMINIQUE ROUSSEAU, PIERRE-YVES GAHDOUN, JULIEN BONNET
minimum, c'est-à-dire un contrôle qui se limite à l'examen de la procédure
législative et des griefs soulevés d'office (28).
Semblant aller plus loin que cette jurisprudence, l'article 2 du règlement
impose aux requérants de mentionner « les dispositions législatives ou les
clauses de l'engagement international sur lesquelles il [le Conseil] est invité à
se prononcer, ainsi que les exigences constitutionnelles qu'elles sont susceptibles
de méconnaître ». À lire un peu rapidement cet article, on pourrait donc
penser que les saisines blanches sont dorénavant interdites.
Mais là encore, il faut aller au-delà des mots contenus dans le règlement
intérieur, car en réalité un (simple) règlement ne peut prohiber une pratique
autorisée par la loi organique. Bien conscient de cette « difficulté », le commentaire
officiel précise que, dans l'hypothèse où le Conseil reçoit une saisine
blanche en dépit de l'interdiction posée par l'article 2 du règlement, il
se contentera alors de contrôler la procédure législative et les griefs soulevés
d'office. Autrement dit, il appliquera son ancienne jurisprudence comme si
l'article 2 n'existait pas...
2. Le portail « QPC 360 »
Si les décisions de filtrage du Conseil d'État et de la Cour de cassation sont
facilement accessibles pour les citoyens, il existe en revanche beaucoup de
mystère en ce qui concerne les décisions rendues par les premiers juges, surtout
lorsque ces derniers refusent de renvoyer les QPC soulevées devant eux.
Mais depuis deux décrets du 13 octobre 2022 (29), il est dorénavant prévu
que toutes les décisions de filtrage dans les affaires QPC devront être « mises
à la disposition du public », ce qui devrait améliorer (en théorie) la transparence
de la justice constitutionnelle. Cette publication prendra concrètement la
forme d'un portail dénommé « QPC 360 » qui n'existe pas encore au moment
d'écrire ces lignes, mais qui devrait voir le jour prochainement sous l'égide
du Conseil constitutionnel.
Bien entendu, les chercheurs peuvent se réjouir de la présence d'un tel
« portail » qui leur offrira un outil précieux pour observer la jurisprudence rendue
par les tribunaux du fond en matière de QPC, notamment la jurisprudence
judiciaire dont le traitement informatisé reste encore aujourd'hui trop peu développé.
En revanche, sur le terrain contentieux il n'est pas certain que ce nouvel
éclairage sur les décisions des juges du fond soit d'un grand intérêt pour les
justiciables et leurs avocats. Il ne suffit pas en effet de connaître la décision
rendue par tel juge des tutelles ou tel tribunal de commerce, il faut encore
pouvoir interpréter cette décision à la lumière d'une masse plus importante de
décisions afin d'en tirer des conclusions pertinentes, ce qui n'est jamais simple.
(28) Cons. const., 26 mai 2011, n° 2011-630 DC, Rec. p. 249.
(29) Décrets n° 2022-1317 et n° 2022-1318.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 1-2023

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