Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023 - 57

DOSSIER - LES POLITIQUES PUBLIQUES : UN CHOIX LIBANAIS ?
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favorisent une marge plus grande à l'analyse. Cet état de fait s'observe à travers
l'usage, dans la formulation des objectifs, de verbes comme comparer, analyser,
synthétiser. À un autre niveau et, pour la première fois dans l'historique des
programmes d'histoire au Liban, le Professeur Abdel Massih constate un effort
fourni dans le but d'introduire des notions et idées nouvelles issues de l'histoire
savante, surtout l'histoire économique, sociale et culturelle (17). Il a fallu
attendre les années 1970-1980 pour que les historiens libanais s'approprient les
avancées de l'École des Annales, comme le montre Candice Raymond, historienne
et chercheuse à l'Institut français du Proche-Orient (IFPO) (18).
Malgré tous les efforts fournis par une équipe d'experts formée d'historiens
et de pédagogues, les manuels produits en 2000 ont été retirés du marché par
ordre du ministre de l'Éducation de l'époque, Abdel Rahim Mourad, prétextant
une mention faite dans une frise chronologique présentant les conquêtes
arabes. Nous comprenons que la classe politique qui a dirigé le pays après
la guerre et qu'on appelle communément « manzouma » depuis les mouvements
de contestation de 2019 n'a pas la volonté de faire aboutir le dossier du
manuel unique d'histoire. Le deuxième frein à la réforme de 2010 a été donné
par la polémique créée par le politicien Samy Gemayel. Ce dernier a exprimé
des réserves par rapport à une certaine terminologie et des manques comme
l'occultation de la « résistance chrétienne » pendant la guerre libanaise. Bahjat
Rizk (19) explique ce genre de réaction par la difficulté des hommes politiques
libanais à concilier entre leur appartenance communautaire et la dimension
nationale à laquelle ils ne peuvent accéder que s'ils élargissent leur vision
communautaire propre à l'échelle de la nation (20).
En l'absence d'une politique étatique cohérente et déterminée, un grand
nombre d'acteurs de la société civile essaient de pallier cette carence. La
Fondation Adyan et l'Association libanaise pour l'histoire (LAH (21)) se
sont attelées à produire des « leçons types » à 5 ans d'intervalle. Elles ont en
commun des thématiques comme l'indépendance du Liban, le conflit armé
complexe de 1975, la situation socio-économique des années 1950-1960,
mais surtout des approches similaires : une méthode active qui se base sur
le recours aux documents, la problématisation, l'argumentation, le débat et
(17) Ibid., p. 48.
(18) Raymond C., « Les Annales à Beyrouth. Circulations savantes et appropriations
historiographiques entre la France et le Liban », Revue d'histoire et des sciences
humaines 2019, n° 34, p. 17 à 34, consulté le 16/08/2022 : https://journals.openedition.
org/rhsh/2955.
(19) Bahjat Rizk est avocat à la cour, écrivain libanais, professeur universitaire et
attaché culturel à la délégation du Liban auprès de l'UNESCO depuis 1990.
(20) Rizk B., « Les minorités et le manuel d'histoire », L'Orient-Le Jour 7 mars
2012, in https://wlcui.com/fr/2012/10/12/les-minorites-et-le-manuel-dhistoire/ [Consulté
le 5 juillet 2022]
(21) Lebanese Association for History.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 1-2023

https://www.journals.openedition https://www.wlcui.com/fr/2012/10/12/les-minorites-et-le-manuel-dhistoire/

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