Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger n°1-2023 - 71

DOSSIER - LES POLITIQUES PUBLIQUES : UN CHOIX LIBANAIS ?
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Les dépenses publiques dans les États sous mandat se caractérisaient par
un niveau élevé de dépenses militaires, surtout dans les premières années,
après les révoltes syriennes. Mais de manière surprenante, la dépense militaire
est restée élevée tout au long de la période, ne diminuant que marginalement
jusqu'en 1935 avant de chuter en 1936-1937. L'effectif estimé
de l'Armée du Levant en 1926 était de 40 000 hommes (23). Ce chiffre
n'inclut pas les forces mobiles irrégulières, qui sont appelées en cas de
besoin pour des opérations de « contre-guérilla ». Le CIC finançait également
divers experts, administrateurs, politiciens en tenue militaire ainsi
que des recrues locales issues de groupes minoritaires (la Légion syrienne).
L'appareil sécuritaire comprenait également la gendarmerie, la police et le
système judiciaire, qui font partie des dépenses civiles indiquées dans le
tableau 2.
Le service de la dette représentait également une part importante des
dépenses, surtout pendant les premières années du mandat. Cela comprenait
164 millions de francs entre 1929 et 1934 payés par le CIC (Rapports,
diverses années). Contrairement aux Turcs qui parvinrent à réduire de moitié
la dette ottomane de la nouvelle République turque, la Syrie et le Liban durent
continuer à rembourser en totalité leur part de la dette ottomane, essentiellement
due à des intérêts français (24).
En conséquence, les dépenses militaires et civiles étaient du même
ordre de grandeur pendant une grande partie de la période du mandat.
Dans le même temps, les dépenses civiles sont restées bien inférieures
aux recettes fiscales. Cet excédent civil a été utilisé pour contribuer aux
dépenses militaires et au service de la dette. Si la contribution était initialement
faible (16 % en 1928), elle a rapidement augmenté pour atteindre
environ 30-40 % au milieu des années 1930 et près de 70 % en 1937
(tab. 2).
Lorsque nous comparons les dépenses civiles et militaires du mandat avec
les colonies françaises, nous constatons que les deux types de dépenses étaient
bien plus élevés par habitant dans les États mandataires que dans les colonies
françaises (tab. 3). Le fait que les dépenses civiles soient plus élevées n'est
pas surprenant puisque, comme nous l'avons vu précédemment, l'effort fiscal
était plus important dans le mandat. Nous pouvons cependant en déduire
que les dépenses civiles auraient pu être encore plus élevées si le niveau des
dépenses militaires n'avait pas été aussi élevé. A contrario, dans les colonies,
où la domination française était déjà consolidée, les dépenses de sécurité
diminuent dans les années 1920 (25). En outre, l'effort militaire n'était pas
financé par les impôts locaux.
(23) Mizrahi J.-D., « Armée, État et Nation au Moyen-Orient... », préc., p. 112.
(24) Al-Saleh M. A., « Introduction de partie... », préc.
(25) V. CDMS.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 1-2023
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