Revue - Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger 6-2023 - 110

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MARLON FERRERI
que le gouvernement français puisse être « représenté dans les conditions
habituelles [de manière à] permettre aux ministres de faire connaître leur position
au Conseil d'État » (66).
Avec l'avis rendu, le Conseil d'État contribue à l'apurement préventif de
l'ordre juridique calédonien. Obligatoire certes, l'avis n'est toutefois pas un
avis conforme. Les autorités politiques locales sont libres de suivre ou de ne
pas suivre les conseils prodigués. Si elles s'en éloignent, elles s'exposeront
cependant à une censure pour inconstitutionnalité, à un déclassement ou à
une inconventionnalité. L'article 100 prévoit que l'avis sera transmis « au président
du gouvernement, au président du Congrès, au haut-commissaire et au
Conseil constitutionnel ». Ce dernier, saisi d'une loi du pays, sera alors en
mesure d'apprécier si le législateur local a repris les recommandations formulées
par le Conseil d'État en matière de constitutionnalité. Figurant dans les
visas de ses décisions LP, l'avis constitue, en effet, un guide pour le Conseil
constitutionnel qui - s'il n'y est pas tenu en droit - peut s'en inspirer pour
identifier certains griefs d'inconstitutionnalité. D'aucuns ont pu souligner que
le Conseil constitutionnel « sera extrêmement attentif à l'argumentation de la
note. Les deux instances du Palais-Royal ont, en effet, à cœur d'harmoniser
[...] leurs jurisprudences et d'éviter des discordances génératrices d'incertitude
et de désordre » (67). À même de constater la dissonance entre la loi du
pays et les recommandations formulées par le Conseil d'État, le juge constitutionnel
pourra porter son attention sur les inconstitutionnalités relevées par
l'avis auxquelles il n'aurait pas été remédié. Les interventions successives du
Conseil d'État puis du Conseil constitutionnel sur les lois du pays contribuent
ainsi au maintien de la légalité républicaine.
2. La rigueur de l'examen accompli
L'examen du Conseil d'État sur tout projet ou proposition de loi du pays
est à la fois rigoureux et approfondi. Après s'être assuré du respect des
consultations préalables obligatoires (68), le Conseil opère, depuis l'origine,
un premier examen systématique de la constitutionnalité de la loi du pays en
devenir, auquel vient s'adjoindre un examen de sa conformité aux dispositions
organiques - notamment celles adoptées le 19 mars 1999. Saisie, en 1999, de
trois projets de loi du pays, la section des finances a d'abord « examiné la
conformité de ces projets à la Constitution et à la loi organique du 19 mars
1999 » (69). Plus récemment, la section sociale attirera l'attention du législa(66)
CE, Rapport public 2000, op. cit., p. 76. L'article R. 123-25 du CJA le précisera
par la suite.
(67) Denoix de Saint-Marc R., « Les projets de loi et de décret devant le Conseil
d'État », in Mélanges en l'honneur de Jean Buffet, 2004, Éd. Petites affiches, p. 186.
(68) CE, fin., avis, 25 juin 2019, n° 397893.
(69) CE, Rapport public 2000, 2000, Doc. fr., n° 51, p. 94.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023
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