Revue - Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger 6-2023 - 118

1522
MARLON FERRERI
l'article 23-8 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 dispose que
les présidents du gouvernement local, du Congrès et des assemblées de province
sont avisés par le Conseil constitutionnel de toute QPC intentée contre
une loi du pays. Ensuite, l'article 23-11 dudit texte précise que la décision du
Conseil constitutionnel sera publiée au JORF, mais aussi au Journal officiel de
la Nouvelle-Calédonie, ce qui témoigne d'une autonomie politique et juridique
renforcée qui participe de la construction d'un système juridique à part entière.
La première décision QPC du 9 décembre 2011 (119) et les suivantes sont
le fruit d'une saisine du Conseil constitutionnel sur le fondement de l'article
61-1 de la Constitution. Contrairement à la saisine a priori (120), il n'y
a donc pas de fondement distinct sur lequel s'appuie la saisine. L'efficacité
de la procédure est mise en exergue dès la première décision, qui abroge des
dispositions d'une loi du pays relative au droit du travail pour méconnaissance
de la liberté syndicale et du principe de participation des travailleurs (121).
Soulignant qu'il ne dispose pas « d'un pouvoir de même nature que celui du
Congrès de la Nouvelle-Calédonie » (122), le Conseil prononcera une abrogation
différée laissant plus d'une année au Congrès pour adopter une nouvelle
loi du pays et remédier aux carences de l'ancienne.
Les apports de la deuxième QPC (123) ne sont pas négligeables. Pour estimer
recevable la requête, le juge examine deux conditions dont le non-respect
est rédhibitoire. Il vérifie d'abord que la disposition à lui soumise est bien tirée
d'une loi du pays. Il vérifie ensuite qu'une décision du Conseil d'État « constatant
que [la disposition contestée] serait intervenue en dehors des matières énumérées
par l'article 99 [de la loi organique qui fixe le domaine de compétence
de la loi du pays] » n'est pas intervenue depuis l'adoption de la loi du pays.
Bien que la disposition confiant le monopole d'importation de viandes à un
établissement public ait été déclarée conforme à la Constitution, cette QPC,
intentée par une société privée, est aussi l'occasion de montrer l'utilisation de
cette procédure par une diversité de requérants qui ont saisi son utilité dans la
protection de leurs droits propres. Autre enseignement qui, lui, apparaît sous un
jour plus défavorable à la constitution d'un État de droit, la disposition contestée
était le fruit d'une validation législative. Bien que ne l'ayant pas censurée, le
Conseil juge qu'« aucun motif d'intérêt général » ne justifie que la loi du pays
soit rendue applicable aux instances en cours à la date de son entrée en vigueur.
La troisième QPC (124), intentée par une association de protection de l'environnement
qui contestait une disposition du code minier local, apportera
(119) Cons. const., 9 déc. 2011, n° 2011-205 QPC, Patelise F.
(120) LO n° 99-209, 19 mars 1999, art. 104.
(121) Cons. 7.
(122) Cons. 9 faisant écho à la formule similaire utilisée à l'égard du Parlement.
(123) Cons. const., 22 juin 2012, n° 2012-258 QPC, Établissements Bargibant.
(124) Cons. const., 26 avr. 2013, n° 2013-308 QPC, Association Ensemble pour la
planète.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023
Revue - Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger 6-2023

Table des matières de la publication Revue - Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger 6-2023
