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L'INTROUVABLE DÉCENTRALISATION DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE (1982‑2022) 1537
comportement de ces secteurs publics nationaux que d'une dépossession par
les administrations centrales et territoriales de l'État » (37).
Cette décentralisation technique aboutit à dresser trois principaux obstacles
à la décentralisation de la politique énergétique : la place essentielle du
nucléaire dans le mix énergétique français, ainsi que l'exploitation des réseaux
publics de transport et de distribution. Pour les deux premiers obstacles, il
est toutefois difficile d'imaginer des compétences transférées aux collectivités
territoriales. Une compétence des collectivités territoriales sur l'exploitation
des réseaux publics de distribution est quant à elle envisageable. Elle
n'est pourtant pas envisagée. Dès les premières heures de la nationalisation,
l'on avait compris que pour ce qui est des contrats de concessions du réseau
public de distribution d'électricité : « [d]e l'ancienne économie du contrat, il
reste une forme juridique inchangée, la substance, elle, a subi une véritable
transmutation » (38). Cet état de fait est caractérisé par le monopole légal
d'ENEDIS en matière de distribution d'électricité, ce qui fait des concessions
y afférentes des délégations de service public dérogatoire de droit commun.
En matière de concessions de distribution, les collectivités territoriales ne
peuvent ni choisir la forme, ni le contenu du contrat, et elles n'ont d'autre
choix que de contracter avec ENEDIS. Il y a une « quasi-disparition de la
liberté contractuelle » (39). Ces contrats sont soumis à la lettre d'un cahier des
charges type négocié nationalement entre EDF, ENEDIS, la FNCCR et France
urbaine (40). Le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE),
quant à lui, est déterminé par la CRE. Au vu de ce régime exorbitant de
droit administratif, l'on pourrait plaider l'atteinte à la libre administration des
collectivités territoriales. La plaidoirie serait toutefois inefficace, le Conseil
constitutionnel ayant estimé que l'intérêt général s'attachant à l'intégration au
niveau national des réseaux de distribution locale justifiait l'atteinte portée au
principe de libre administration des collectivités territoriales (41). Reste enfin
alors la seule possibilité d'être associé avec des représentants dans les comités
de surveillance des sociétés gestionnaires des réseaux de distributions d'électricité
et de gaz (C. énergie, art. L. 111-56 et L. 111-56-1).
Au sujet du modèle de cahier des charges, le Conseil d'État a rappelé
dans son avis du 27 octobre 2021 (42) qu'il n'y avait pas de reconduction
(37) Ibid., p. 134.
(38) Rivero J., « Le régime... », art. préc., p. 147.
(39) Ponthier J.-M., « Les entreprises locales de gaz et d'électricité », in GISGRALE-CNRS,
Collectivités territoriales et énergie..., op. cit., p. 120 et 121.
(40) Sablière P., « Un nouveau modèle de cahier des charges pour la concession
des distributions publiques d'électricité dans les trente ans à venir », Énergie - Env.
- Infrastr. 2018/7, étude 12.
(41) Cons. const., 30 nov. 2006, n° 2006-543 DC, Loi relative au secteur de l'énergie,
cons. 31.
(42) CE, avis, 27 oct. 2021, n° 452903.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023

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