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DOSSIER - INDÉPENDANCE ET LIBERTÉ DES MÉDIAS
aux États (13) de moduler leurs ingérences nécessaires pour protéger la liberté
d'expression en matière de pluralisme interne. La France est avec l'Italie l'un
des pays européens qui protègent le pluralisme externe de la manière la plus
stricte : le respect de la Convention européenne ne lui impose pas de mieux
protéger le pluralisme interne.
B. - Les aides publiques à la presse
Des parlementaires ont suggéré de subordonner l'octroi des aides publiques
à la presse (14) à l'existence de garanties d'indépendance de la rédaction.
On peut imaginer que ces garanties deviennent l'une conditions d'obtention
du certificat d'inscription délivré par la Commission paritaire des publications
et agences de presse (15) ou faire obligatoirement l'objet d'une clause
de la convention-cadre que les entreprises de presse les plus aidées doivent
signer avec l'État (16). Cette manière de promouvoir l'indépendance de la
rédaction sous couvert des aides d'État paraît compatible avec la liberté
d'entreprendre (17). Serait-elle contraire au principe d'égalité ? Non sans
doute : la différence de traitement entre médias selon qu'ils accordent ou
pas une indépendance à leur rédaction, reposerait sur une différence objective
de situation. Encore faudrait-il démontrer que ne pas aider de la même
manière pour des raisons tenant à leur organisation interne, des entreprises
qui se disputent le même marché, ne fausse pas la concurrence de manière
illicite. Surtout, subordonner les aides à l'indépendance de la rédaction ne
pourrait concerner en fait que la presse écrite (qu'elle soit imprimée ou en
ligne) mais pas les services de communication audiovisuelle. Cela ne réglerait
donc pas tout le problème.
La conclusion de cette partie est nette : le respect du pluralisme n'est pas un
motif pertinent pour justifier une loi qui imposerait à tous les médias de doter
leur rédaction d'une certaine indépendance. La conclusion sera plus nuancée
si l'on se tourne vers les autres aspects du régime juridique des médias.
(13) Qui « doivent [...] en principe jouir d'un large pouvoir d'appréciation dans leur
choix des moyens à déployer pour garantir le pluralisme dans les médias » (CEDH, gde
ch., 5 avr. 2022 préc., § 193).
(14) Hors avantages fiscaux et postaux, leur montant s'élève à une centaine de millions
d'euros chaque année.
(15) La commission est régie par le D. n° 97-1065, 20 nov. 1997.
(16) V. D. n° 2012-484, 13 avr. 2012 relatif à la réforme des aides à la presse, au
fonds stratégique pour le développement de la presse et au fonds de soutien à l'émergence
et à l'innovation dans la presse.
(17) Elle exigerait d'ajouter le non-respect de l'obligation nouvelle aux causes de
suspension des aides que prévoit l'article 15-1 de la loi n° 86-897 du 1er
août 1986
portant réforme du régime juridique de la presse. Il ne vise actuellement que les manquements
aux obligations de transparence et d'adoption d'une charte de déontologie.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023

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