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DOSSIER - INDÉPENDANCE ET LIBERTÉ DES MÉDIAS
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(par recoupement d'informations publiques) la vraisemblance des déclarations
qui lui sont adressées (15). En effet, le dernier alinéa du I de l'article 11 précité
dispose que les « mesures » prises par les plateformes au titre de leur devoir de
coopération dans la lutte contre la manipulation de l'information, ainsi que les
moyens qu'elles consacrent à cette lutte, sont rendues publiques. Chaque opérateur
est ainsi censé rendre compte annuellement à l'ARCOM. En pratique,
néanmoins, l'initiative est inversée : l'ARCOM adresse aux plateformes concernées
un questionnaire qu'elles sont invitées à remplir pour lui permettre d'établir
son bilan, ce qui leur impose de rentrer dans un luxe de détails qui n'aurait sans
doute pas été fournis lors de déclarations spontanées. Mais toutes les rubriques
ne sont pas renseignées et l'ARCOM n'a aucun moyen d'exiger qu'elles le
soient (ou de vérifier les réponses ainsi données) (16)... Pire : l'ARCOM ne dispose
d'aucun pouvoir de sanction. Ici, il n'est pas question pour elle de mettre en
demeure une plateforme qui ne se conformerait pas à ses obligations légales et
de le sanctionner en cas de persistance de ce mauvais comportement. Au mieux,
l'ARCOM peut-elle dénoncer publiquement, dans ses « bilans périodiques », les
insuffisances qu'elle constate dans la mise en œuvre de la loi.
Tout ceci peut donner une impression amère car, au sentiment d'impuissance,
s'ajoute le soupçon qu'à travers la diffusion d'informations fausses
mais virales les plateformes engrangent des recettes publicitaires importantes
qui leur permettent de tirer profit du phénomène même qu'elles sont censées
combattre (17). Mais l'espoir d'une action plus sincère naîtra peut-être des
initiatives parallèlement engagées au niveau européen.
B. - Le contrôle européen
Au niveau européen, la lutte contre la manipulation de l'information est
en train de passer d'une logique d'autorégulation et une véritable logique de
régulation.
p. 4). Mais elle admet par ailleurs une intensification de la coopération en période
électorale (ARCOM, Retour sur trois années d'application de la loi du 22 décembre
2018, nov. 2022, p. 4).
(15) L'ARCOM dénonce ainsi « les limites d'un cadre essentiellement souple qui
ne permet pas d'exiger des plateformes qu'elles rendent des comptes » (Bilan annuel,
nov. 2022, p. 4).
(16) En toute hypothèse, les informations obtenues ne permettent pas d'identifier les
manipulations de l'information qui sont spécialement liées à une influence étrangère
(ibid., p. 46).
(17) Le bilan « 2020 » du CSA déplorait déjà que les utilisateurs ne soient pas
davantage informés sur « les pratiques coordonnées d'influence » et regrettait que les
plateformes ne fassent pas davantage preuve de transparence « à tout le moins à l'égard
du régulateur, sur les recettes publicitaires potentielles générales par les comptes propageant
massivement de fausses informations ». Mais il se gardait bien d'individualiser
ces critiques. Les mauvais élèves sont encore loin d'être cloués au pilori.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023

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