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DOSSIER - INDÉPENDANCE ET LIBERTÉ DES MÉDIAS
scientifique (CES) qui l'aiguille (il ne le contrôle pas), composé d'experts
dans de nombreux domaines (droit, médias, diplomatie, etc.) et présidé par
une conseillère d'État. Le service a déjà prouvé son utilité en ce qu'il est
parvenu à identifier des ingérences réalisées aussi bien dans le contexte
électoral qu'en dehors de ce cadre. Lors de sa première année d'exercice, le
service a ainsi détecté des dizaines de phénomènes dits « inauthentiques »,
douze d'entre eux ayant donné lieu à une enquête approfondie. Cinq phénomènes
furent finalement qualifiés d'« ingérence étrangère numérique » lors
des élections présidentielles et législatives de 2022 (14). À ce jour, le haut
fait de VIGINUM est sans aucun doute d'être parvenu à identifier une campagne
russe de déstabilisation du soutien occidental à l'Ukraine. Au-delà
du recours à de faux comptes sur les réseaux sociaux destinés à partager du
contenu trompeur parfois sponsorisé, les acteurs de cette ingérence étrangère
étaient allés plus loin puisqu'ils avaient créé des sites Internet d'actualité
dédiés à la remise en cause de la politique occidentale, voire des décalques
de sites officiels gouvernementaux et de médias traditionnels en se servant de
la méthode dite du « typosquatting ». La méthode est assez simple puisqu'il
s'agit d'acheter un nom de domaine dont l'intitulé est proche de celui que
l'on souhaite imiter, pour que l'utilisateur, parfois inattentif, soit redirigé
vers un site qu'il croit être le bon. Quatre médias français ont ainsi été visés
(ex. : 20 Minutes, Le Monde...) (15). L'on imagine les effets qu'une telle
méthode, aussi subtile et pernicieuse, peut avoir sur les esprits lorsqu'il lui
est permis de perdurer, d'où l'importance de contrer ces tentatives. Certains
des sites détectés ne sont plus accessibles, et des plaintes pour usurpation
d'identité ont été déposées. Avec le soutien de l'Union européenne et de
l'OTAN, VIGINUM contribue donc bel et bien à la défense des intérêts
fondamentaux de la Nation et gagnera en puissance.
II. - La suspension des médias russes :
un baptême du feu pour la puissance publique
Dans un contexte dit de guerre informationnelle, la puissance publique
se retrouve confrontée à un défi sans précédent qui dépasse le seul cadre
national puisqu'il concerne l'Europe dans son ensemble. La suspension des
médias russes actée après l'invasion de l'Ukraine témoigne de cette nécessaire
articulation entre droit national et droit européen - Union européenne
et Conseil de l'Europe (A). Face à cela, il faut aussi s'interroger sur le rôle
et les moyens concrets dont dispose la puissance publique pour combattre
ces ingérences (B).
(14) VIGINUM, « Année #1 », 2022.
(15) VIGINUM, « RRN : une campagne numérique de manipulation de l'information
complexe et persistante. Rapport technique », 19 juin 2023.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023
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