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DOSSIER - INDÉPENDANCE ET LIBERTÉ DES MÉDIAS
A. - Les récusations des nominations politiques
Les interrogations du rapport Copé (31) préparatoire à la loi du 5 mars 2009
concernant la modification des modalités de nomination des responsables de
l'audiovisuel public paraissaient fondées : pourquoi sont-ils nommés par le
CSA, autorité administrative indépendante et non par une autorité représentative
de l'actionnaire unique qu'est l'État ?
La conclusion logique qui aurait dû en découler était une désignation par le
conseil d'administration des organismes concernés, composé d'une majorité
de représentants de l'État au sein de celui-ci. Tel ne fut nullement le cas au
terme d'un invraisemblable exercice de byzantinisme juridique, aboutissant
à une conclusion exactement contraire (32). Les préconisations extravagantes
dudit rapport subirent un cinglant désaveu de la part du Président Sarkozy,
le jour même de sa remise, mais au profit d'une nomination directe par luimême,
président de la République, en Conseil des ministres.
Telle est la situation qui a caractérisé l'état du droit à compter de la loi
de 2009 (33) relative à l'« indépendance de l'audiovisuel public ». Situation
renouant, sous cet angle, avec la pire période ayant caractérisé l'audio visuel
public comme « Voix de la France » selon la caractérisation de Georges
Pompidou. Qu'il suffise ici de rappeler que lorsqu'il connut ses premières
formes d'organisation institutionnelle sous la ve
République (ordonnance du
4 février 1959 créant la RTF), le monopole public fut, d'abord, un authentique
monopole politique : l'établissement public en cause était dépourvu de
conseil d'administration et directement placé « sous l'autorité du ministre de
l'Information ». Son directeur général était nommé par décret en Conseil des
ministres. La réforme de 1964 (34) créant l'ORTF mit fin à certaines pathologies
institutionnelles de la RTF mais elle maintint la nomination par décret
du directeur général et c'est dans ce contexte que Georges Pompidou pouvant
sereinement formuler sa fameuse définition de l'audiovisuel public comme
« Voix de la France » c'est-à-dire comme média d'État, éradiquant les principes
traditionnels d'identification des services publics (égalité de traitement,
non-discrimination, pluralisme). La réforme de 1972 (35), consécutive au rapport
Paye (36), conçue en termes d'ouverture voulue par le Premier ministre
Chaban Delmas, échoua dès lors qu'elle ne remit pas en cause cette procédure
(31) Rapport de la Commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par
J.-F. Copé, remis au président de la République, 25 janv. 2008.
(32) Le rapport Copé préconisait notamment une refonte de la composition du conseil
d'administration dont la majorité appartiendrait aux représentants « du monde de l'entreprise
», cf. Regourd S., Vers la fin de la télévision publique, op. cit., p. 35 et s.
(33) L. n° 2013-1028, 15 nov. 2013.
(34) L. n° 64-621, 27 juin 1964.
(35) L. n° 72-533, 3 juill. 1972.
(36) Rapport de la Commission d'études du statut de l'ORTF, 23 juill. 1970.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° 6-2023
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