Systèmes - Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique - 2e - 199

La France et la guerre d'Algérie
d'accueil. En étudiant les conditions de vie dans chaque site répertorié
comme ayant accueilli des harkis après 1962, sont évaluées la
ségrégation spatiale, la ségrégation scolaire et la précarité du logement.
Ainsi, 45 nouveaux sites ont été identifiés et proposés pour un
élargissement du périmètre de l'indemnisation en 202313
; en 2024,
la Commission procède de même et propose, dans son rapport,
l'ajout d'autant d'autres sites14
.
Le dispositif indemnitaire ainsi mis en place a certes l'avantage
de dépasser l'impasse contentieuse liée à l'application de la prescription,
il n'en demeure pas moins l'objet de nombreuses critiques.
D'emblée, les montants indemnitaires ont semblé trop faibles pour
correspondre à la réparation du vécu15
, en particulier en certains
sites. Par ailleurs, la dimension forfaitaire et automatique de l'indemnisation
ne répond pas à une approche individualisée des préjudices,
ni à l'hétérogénéité des situations vécues. Enfin, la date du
31 décembre 1975 est discutée : des camps et hameaux ont continué
d'accueillir les familles qui ne pouvaient pas toutes les quitter dès
cette date. En revanche, le mécanisme mis en place permet de traiter
un grand nombre de demandes, de manière homogène.
L'insatisfaction sur les montants octroyés par le juge administratif
a conduit plusieurs membres de la fratrie Tamazount, après l'arrêt
du Conseil d'État de 2018, à poursuivre leur action devant la Cour
européenne des droits de l'homme. Celle-ci a remis en cause les
montants indemnitaires octroyés par le juge administratif français,
ce qui produit des effets sur le mécanisme indemnitaire créé par la
loi de 2022 que cette jurisprudence a inspiré.
13. V. décret nº 2023-890 du 21 septembre 2023 relatif à l'extension du périmètre d'application
du mécanisme de réparation confié à la Commission nationale indépendante de
reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, les autres personnes
rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil et de droit local et les membres de
leurs familles et aux modalités d'organisation de cette instance. CNIH, Rapport d'activité
2022, La Documentation française, 2023, p. 52 s. Le contenu du rapport inspire une nouvelle
action en justice : KESSOUS M., « Des harkis demandent « réparation » à la SNCF et à
la Sonacotra », Le Monde, 27 sept. 2023.
14. DULPHY A., « « Camps, hameaux de forestage, cités Sonacotra... : la diversité des sites
d'accueil des harkis à partir de 1962 », RFDA 2024, no
5, à paraître.
15. KERCHOUCHE D., « Enfant des camps de harkis, je ne donne pas le droit à l'État de chiffrer
ma souffrance », Le Monde, 27 nov. 2021.
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