Systèmes - Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique - 2e - 58

Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique
l'occasion d'abandonner l'exigence de faute lourde, autrefois retenue
en matière de pharmacovigilance comme le montre, par exemple,
l'affaire du Stalinon9
. Une faute (simple) est identifiée à partir de
1999, le juge considérant que, pour la période antérieure, les éléments
d'information relatifs à la proximité entre le Mediator et les
fenfluramines n'étaient pas suffisants. On retrouve ici une démarche
calendaire précédemment évoquée pour les scandales du sang
contaminé et de l'amiante afin de déterminer le point de départ de
la période de carence de l'État (jusqu'au retrait de l'AMM)10
. Ce sont
finalement dix années de retard qui sont reprochées à l'AFSSAPS :
de 1999 à 2009, la pharmacovigilance a failli.
Le Conseil d'État refuse de condamner la puissance publique à
indemniser intégralement les victimes : il rejette (contrairement au
tribunal administratif et à la cour administrative d'appel qui se sont
prononcés avant lui) l'idée d'appliquer une obligation in solidum
entre l'État et les laboratoires Servier et distingue nettement le
rôle du contrôleur et celui du contrôlé. Il refuse de prolonger la
jurisprudence D. G. B. sur le sang contaminé, il oppose au contraire
les deux hypothèses. Dans ces arrêts, il avait, au regard de la collaboration
étroite entre les personnes poursuivies, fait le choix de
l'obligation in solidum ; pour le Mediator, il souligne qu'il n'y a pas
collaboration étroite entre les coresponsables mais une relation
entre l'État puissance publique et une personne privée placée sous
son contrôle (v. les arrêts no
393902 et no 393904). La CAA de Paris
devant laquelle ces affaires ont été renvoyées a déterminé la part
de responsabilité de l'État à hauteur de 30%11
. Dès lors, pour obtenir
l'indemnisation intégrale de leurs préjudices, les victimes doivent
engager une autre action, devant le juge judiciaire.
La jurisprudence de 2016 (arrêt no
393108) a également pour
intérêt d'admettre la possible indemnisation du préjudice d'anxiété
pour des victimes du Mediator. Cependant, les conditions posées
pour établir ce préjudice ne sont pas remplies selon le Conseil
d'État et la demande indemnitaire est rejetée sur ce point. Surtout,
on constate, à la lecture de cette jurisprudence, que, selon le
Conseil d'État, le risque de développer une valvulopathie ou une
hypertension pulmonaire artérielle n'est pas suffisamment élevé
9. CE, ass., 28 juin 1968, no 67677, Société des Établissements Février-Decoisy-Champion,
Lebon, p. 411 ; RD publ. 1969, p. 312, note WALINE.
10. LANTERO C., note sous CE, 16 nov. 2020, no 431159, Dr. adm,no 2, févr. 2021, comm. 9.
11. CAA Paris, 4 août 2107, no
16PA00157, no
16PA03634.
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