Systèmes - Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique - 2e - 65

Le Mediator
laboratoires Servier14
. Le parquet de Paris a fait appel de ce jugement
(suivi d'un appel des laboratoires eux-mêmes).
Par un arrêt du 20 décembre 2023, la cour d'appel de Paris a
condamné les laboratoires Servier pour escroquerie des organismes
de sécurité sociale et mutuelles ainsi que pour obtention frauduleuse
des autorisations de mise sur le marché. Elle confirme le
jugement rendu sur les qualifications de tromperie aggravée et d'homicides
et blessures involontaires ; plus de 7 650 personnes
s'étaient portées partie civile, tandis que les dommages-intérêts
dus aux caisses d'assurance maladie et mutuelles dépassent
416 millions d'euros. Pour l'essentiel, le jugement est confirmé
pour ce qui concerne l'indemnisation des victimes. Sur le plan
pénal, l'amende prononcée par la cour d'appel est de plus de 9 millions
d'euros, Un autre procès aura lieu pour les 5 000 dossiers de
victimes qui se sont portées partie civile pour les faits d'homicides
et blessures involontaires. La condamnation de M. Seita est portée à
une année de prison ferme (aménagée en détention à domicile sous
surveillance électronique) et trois années avec sursis ainsi qu'à
89 100 euros d'amende. Les sociétés du groupe Servier ont saisi la
Cour de cassation. Quelques mois après cette décision, ce groupe
annonçait la vente de sa filiale Biogaran. Les enjeux que soulève
une telle annonce, dans ce contexte, soulignent la prégnance de
l'argument économique dans un domaine de santé publique, mais
aussi des effets de communication15
.
La Cour de cassation a par ailleurs rendu un arrêt le 15 novembre
2023 qui permet aux victimes de médicaments d'utiliser les différentes
voies du droit civil. Après une offre d'indemnisation formulée
par l'ONIAM, une victime du Mediator a souhaité agir en justice
trois années plus tard. Or la responsabilité du fait du producteur est
un régime spécial qui intègre un délai de prescription de trois ans.
La Cour a reconnu que l'intéressée pouvait agir sur le fondement de
la responsabilité pour faute de droit commun : ainsi, face à un producteur
qui maintient un produit sur un marché, en connaissant les
risques qu'il présente, la faute ainsi constituée peut être envisagée
comme fondement de sa responsabilité. S'applique alors un délai de
prescription de 10 ans selon le droit commun, tandis que le défaut
14. SECKEL H., « Procès du Mediator : le mensonge de Servier reconnu, les parties civiles partagées
sur le jugement », Le Monde, 30 mars 2021.
15. BEZAT J.-M., « Pharmacie : " Inquiétude, sur le front des génériques, autour de la mise en
vente discrète de Biogaran par sa maison mère, Servier " », Le Monde, 19 avr. 2024.
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