Manuel - Droit des affaires - 12e - 332

DROIT DES AFFAIRES
dévalorise l'entreprise10
. Peu importe que le propos soit vrai ou faux11
.Ce n'est pas
le mensonge que l'on sanctionne mais l'image que l'on transmet. Le caractère péjoratif
du propos peut même être implicite.
En revanche, la diffusion en ligne d'une condamnation pour contrefaçon par la
victime de cette contrefaçon ne constitue pas un acte de dénigrement12
. Une évolution
semble se dessiner en jurisprudence en faveur d'un élargissement de la liberté
d'expression. La Cour de cassation a admis, par exemple, que des critiques, même
sévères, sont admissibles « lorsqu'elles s'inscrivent dans un débat d'intérêt général »,
comme celui portant sur la santé publique, et qu'elles « ne dépassent pas les limites
admissibles de la liberté d'expression »13
. Selon le même arrêt, la critique doit cependant
reposer sur « une base factuelle suffisante ».
Le dénigrement doit être distingué de la diffamation14
, qui est un délit pénal. La
distinction n'est pas toujours aisée. Le dénigrement suppose que la critique porte
sur les produits ou les services du concurrent et qu'elle vise la captation de la clientèle
de celui-ci15
2) Lapublicité. Les propos doivent être diffusés dans le public ou destinés à l'être.
Une correspondance privée ne constitue pas un dénigrement.
3) L'identification. Les propos doivent viser une personne déterminée, identifiable.
Mais il n'est pas nécessaire que la personne soit nommément désignée. Le
propos allusif suffit à constituer le dénigrement, lorsqu'il ne laisse guère de doute
quant à la personne visée. Le propos peut aussi viser les produits ou la marque du
concurrent. Dans certains cas, la jurisprudence sanctionne les propos tenus sur un
groupe de professionnels.
4) Le concurrent. Ledénigrement constitueun actedeconcurrence déloyale en
l'absence d'un rapport direct et effectif entre les personnes concernées16
.
B. L'exemple de la publicité comparative
639. La publicité comparative consiste pour un commerçant à comparer
publiquement ses produits à ceux d'un concurrent nommément désigné. La
comparaison porte sur les prix ou sur les qualités de produits semblables ou
encore sur la nature des services offerts aux consommateurs. Le procédé, à
10. Cass. com., 25 sept. 2012, nº 11-21266.- La jurisprudence se montre parfois plus tolérante. Elle accepte
la critique publique de la politique commerciale d'un concurrent, pourvu que le propos soit modéré en la
forme et que les termes ne soient pas outranciers, v. CAParis, 24 nov. 2004, BRDA2005/10, nº 21.
11. Ainsi, constitue un acte de concurrence déloyale le fait d'adresser à des clients une lettre les informant
de la non-conformité d'un produit à la réglementation européenne (Cass. com., 24 sept. 2013, nº 12-19790).
12. Cass. com., 18 oct. 2017, nº 15-27036, Contrats, conc. consom. 2018, comm. 6, obs. M.MALAURIE-VIGNAL.
Mais l'abus consistant à outrepasser les termes du dispositif du jugement de condamnation est un acte de
concurrence déloyale (même arrêt).
13. Cass. 1re
civ., 11juill. 2018, nº 17-21457, Contrats, conc. consom. 2018, comm. 191, obs.
M.MALAURIE-VIGNAL.- De même, le slogan publicitaire d'un hypermarché (« En France, le prix d'un même
médicament peut varier du simple au triple : il faut changer de traitement ! ») ne constitue pas un acte de
concurrence déloyale car il s'inscrit, selon la Cour de cassation, dans un débat d'actualité sur le maintien
du monopole des pharmaciens pour la vente des médicaments non remboursés. En outre, le contenu du
slogan est mesuré (Cass. com., 21juin 2016, nº 14-22710).- Adde :Cass. com.,9janv.2019, nº 17-18350,
Contrats, conc. consom. 2019, comm. 43, note M. MALAURIE-VIGNAL.
14. Cass. com., 10 févr. 2021, nº 18-24302.
15. CAParis, 6janv. 2021, nº 20/08857, Contrats, conc. consom. 2021, comm. 39, note M.MALAURIE-VIGNAL.
16. Cass. com., 4mars 2020, nº 18-15651, Contrats, conc. consom., 2020, comm. 96, obs. M.MALAURIE-VIGNAL.
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