Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°1-2023 - 148

CASE LAW
gouvernementale du 14 novembre 1986 de suspendre la licence d'exportation, ce
dont le Demandeur ne peut être tenu pour responsable, et non l'embargo de juin
1990 ordonné à l'encontre de l'Irak dont sa responsabilité aurait pu découler. Sur
le fondement de ce qui précède, le tribunal arbitral décide de rejeter dans son
intégralité la demande reconventionnelle du Défendeur " » 15
.
Selon les arbitres, la demande dont ils étaient saisis ne les amenait donc
pas à examiner une demande liée à une inexécution causée par les mesures
d'embargo, cette inexécution étant causée par la suspension antérieure des licences
d'exportation.
Nul doute que la décision adoptée dans la sentence finale a influencé le
raisonnement de la Cour, celle-ci étant déjà informée, au stade de l'examen de
la sentence partielle, que la sentence finale ne faisait pas droit à la demande
irakienne.
2. L'inconciliabilité de décisions
L'affaire Armamenti donne aussi l'occasion de se (re)pencher avec plaisir sur la
question de l'inconciliabilité de décisions sous deux angles : l'inconciliabilité avec
une sentence arbitrale n'impliquant pas les mêmes parties (a) et l'inconciliabilité
avec un arrêt rendu dans l'Union européenne (b).
a. L'inconciliabilité entre deux sentences arbitrales
La Cour rappelle dans son arrêt que deux décisions sont inconciliables
lorsqu'elles « entraînent des conséquences juridiques qui s'excluent mutuellement
rendant impossible une exécution simultanée dans l'ordre juridique interne » 16
Un arrêt de la Cour de cassation du 16 septembre 2020 17
.
rendu en matière
judiciaire a apporté des lumières bienvenues, en clarifiant que les juges du fond
ne doivent pas se contenter d'apprécier une possible inconciliabilité au regard du
dispositif de la décision. Ils doivent également tenir compte des motifs retenus
par les décisions pour déterminer si elles entraînent des conséquences juridiques
qui s'excluent mutuellement 18
. En matière d'arbitrage, la doctrine la plus autorisée
indique que « des décisions qui statuent différemment sur la compétence arbitrale
[peuvent] caractériser une inconciliabilité » 19
.
15. Cons. 43.
16. Cons. 39.
17. Cass. 1re
Pal., 13 oct. 2020, note C. Berlaud.
18. J. Gavriloff, note sous Cass. 1re
civ., 16 septembre 2020, n° 18-20.023 ; D. 2021, 340-343, note J. Gavriloff ; Gaz.
civ., 16 septembre 2020, n° 18-20.023, D. 2021, 340-343 :
« Il est donc désormais exigé des juges du fond qu'ils ne se contentent pas d'apprécier une possible
inconciliabilité au regard de la solution effectivement retenue par la décision dont l'exequatur
est requise, et au regard du dispositif de la décision qui la révèle ; il leur appartient de s'attacher
également aux motifs retenus par le juge étranger ».
19. C. Debourg, « L'autorité de chose jugée des décisions relatives à la compétence arbitrale »,
Rev. arb. 2016, p. 127.
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The Paris Journal of International Arbitration 2023‑1

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