Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°1-2023 - 154

CASE LAW
Ainsi, la cour d'appel fait référence dans son arrêt aux arrêts rendus par la CJCE
dans les affaires Rich 43
et Van Uden 44
de la Convention de Bruxelles, prédécesseuse du Règlement Bruxelles I 45
La Cour vise expressément l'un des attendus de l'arrêt Rich 46
mais qui
concernait la question de savoir si un jugement relatif à la désignation d'un arbitre
relevait de la Convention de Bruxelles. En effet, l'arrêt Rich ne se prononçait
pas sur la question d'un jugement au fond ayant tranché une question préalable
concernant l'exception d'arbitrage. La doctrine considère d'ailleurs qu'avec l'arrêt
West Tankers, la CJUE s'est éloigné des arrêts Rich et Van Uden 47
.
Soucieuse de bien faire, la cour d'appel est allée chercher du soutien dans le
considérant n° 12 du Règlement Bruxelles I bis, en soulignant qu'afin « d'assurer
une continuité dans l'interprétation, il n'y a pas lieu d'exclure les considérants issus
du Règlement Bruxelles I bis, dont l'article 1er 2. d) est rédigé en termes identiques,
dès lors qu'ils apportent des éléments permettant d'y contribuer » 48
.
Le deuxième et le troisième paragraphes du considérant n° 12 du Règlement
Bruxelles I bis indiquent :
« Une décision rendue par une juridiction d'un État membre concernant la
question de savoir si une convention d'arbitrage est caduque, inopérante ou non
susceptible d'être appliquée ne devrait pas être soumise aux règles de reconnaissance
et d'exécution inscrites dans le présent règlement, que la juridiction se soit prononcée
sur cette question à titre principal ou incident.
Par ailleurs, si une juridiction d'un État membre, dans le cadre de l'exercice de
sa compétence en vertu du présent règlement ou de son droit national, a constaté
qu'une convention d'arbitrage est caduque, inopérante ou non susceptible d'être
appliquée, cela ne devrait pas empêcher que sa décision au fond soit reconnue ou,
le cas échéant, exécutée conformément au présent règlement [...] ».
Il ressort de la lecture de ce considérant que la décision sur l'applicabilité de la
clause ne relève pas du Règlement, mais que la décision tranchant le fond du litige
après avoir écarté la clause doit bénéficier de la reconnaissance de plein droit au
sein de l'Union européenne.
On voit mal comment mettre en œuvre l'architecture juridique 49
ce considérant qu'un auteur a qualifié, à juste titre selon nous, de « sibyllin » 50
exposée dans
.
Mais la cour d'appel de Paris n'a cité que le premier de ces deux paragraphes
pour conclure que « l'arrêt de la cour d'appel de Milan s'étant prononcée, avant
de statuer au fond, sur l'arbitrabilité du litige, sa décision rentre bien dans le champ
43. CJUE, 25 juillet 1991, Marc Rich & Co. AG c. Società Italiana Impianti PA, C-190/89 ; JDI
1992, p. 488, obs. Huet, Rev. crit. 1993, DIP, p. 310, note Mayer.
44. CJCE, 17 novembre 1998, Van Uden Maritime BV, agissant sous le nom Van Uden Africa
Line c. Kommanditgesellschaft in Firma Deco-Line e.a., C-391/95 ; Rev. arb. 1999, p. 143, note
H. Gaudemet-Tallon.
45. Cons. 62.
46. Cons. 62.
47. S. Bollée, Rev. arb. 2009, p. 406, note sous CJCE (Grande Chambre), 10 février 2009,
Allianz SpA et Generali Assicurazioni Generali SpA c. West Tankers Inc., C-185/07.
48. Paris, Pôle 5 - Chambre 16, 1er
février 2022, n° 19/22977, cons. 63.
49. Pour une étude approfondie sur cette question voir A. Mourre et M. Nioche, « Le règlement
Bruxelles I " refondu " évite le risque d'une régionalisation de l'arbitrage », Cah. arb. 2013, p. 567.
50. M. Nioche, « La frontière entre l'arbitrage et le règlement Bruxelles I », note sous CJUE
(Grande Chambre), 13 mai 2015, Gazprom c. Lituanie, C-536/13, Gaz. Pal. 22 sept. 2015, p. 22.
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The Paris Journal of International Arbitration 2023‑1
en juillet 1991 et novembre 1998, au visa
.
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