Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°3 - 2023 - 35

DOCTRINES - DÉBATS
Or, l'arrêt ne précise pas si le PAD a respecté ce délai qui s'imposait pourtant
à lui. L'arrêt se contente de relever que les doutes du PAD auraient été provoqués
par la publication de l'hommage (para. 28 de l'arrêt), laquelle est datée du
15 avril 2021 (ibid.), et que « les doutes ainsi invoqués par la société PAD (...)
portent sur des faits révélés postérieurement à la sentence » (para. 29 de l'arrêt),
avec pour conséquence que le PAD ne peut être réputé « avoir renoncé à s'en
prévaloir durant l'instance arbitrale » (ibid.). Certes, mais qu'en est-il de l'obligation
de réaction ? En d'autres termes, dans sa motivation de la recevabilité à agir du
PAD, l'arrêt ne dit pas si le PAD a formé une demande en récusation fondée sur
l'hommage et si donc la CCI a été appelée à statuer sur un défaut d'indépendance
fondé sur cet hommage.
La Cour se contente de relever que l'hommage est daté du 15 avril 2021 et
que l'action en récusation a été exercée le 20 avril 2021 (para. 28 de l'arrêt),
sans plus de précision. Cette interrogation s'avère d'autant plus critique en
l'espèce que la Cour mentionne que selon la société DIT, le PAD n'aurait « pas
formé de demande de récusation sur ce fondement » (para. 21 de l'arrêt). Dans
le rappel de l'argumentation du PAD, la Cour mentionne qu'une demande
de récusation a été formée le 20 avril 2021 (para. 22 de l'arrêt). Mais cette
circonstance n'est pas reprise dans les motifs de l'arrêt fondant la recevabilité à
agir du PAD (paras. 23 à 29 de l'arrêt). Il faut regretter l'imprécision de l'arrêt
sur ce point.
- Selon la Cour, le PAD soutient à propos de l'arbitre en cause que « ce
n'est qu'en prenant connaissance de l'hommage funèbre (...) en avril 2021 (...)
que des doutes sur son impartialité sont devenus des certitudes » (para. 31 de
l'arrêt). Par ailleurs, il ressort de l'arrêt que dès novembre 2020, un article aurait
été publié à l'initiative du PAD dans une revue « Repères », faisant déjà état
d'un « parti pris » du président du tribunal arbitral en sa défaveur (para. 38 de
l'arrêt). Or, si le PAD entretenait des doutes sur l'impartialité du président du
tribunal arbitral dès novembre 2020, soit bien avant l'hommage litigieux daté
du 15 avril 2021, au point de reprocher dès cette époque un « parti pris » dudit
arbitre, et que l'action en annulation est fondée sur le grief tiré de l'existence
de doutes sur l'indépendance et l'impartialité d'un arbitre, il appartenait au
PAD d'exercer sans tarder en novembre 2020 une action en récusation contre
l'arbitre, fondée sur les doutes qu'il affirme avoir nourri dès cette époque et
donc dès avant l'hommage funèbre. Faute d'avoir exercé cette action, le PAD
pourrait apparaître tardif dans son grief de défaut d'indépendance et donc
irrecevable à agir en annulation, conformément à l'article 1466 du Code de
procédure civile 68
. À nouveau, la Cour d'appel ne précise pas en quoi, tout
en ayant nourri des doutes sur l'impartialité de l'arbitre dès novembre 2020 au
point de reprocher, dans une revue, un parti pris au président du tribunal, sans
pour autant avoir agi en récusation, le PAD pouvait néanmoins être recevable,
cinq mois plus tard, à agir en annulation du chef de défaut d'indépendance
et d'impartialité de l'arbitre. En n'agissant pas en récusation à l'époque de la
publication de la revue, le PAD n'a-t-il pas démontré que ses doutes n'étaient pas
sérieux voire en réalité inexistants, et qu'il apparaît alors difficile que l'hommage
68. En ce sens, J. Jourdan-Marques, chron. cit. ; D. Mainguy, note cit. ; D. Mouralis, note. cit.
Les Cahiers de l'Arbitrage 2023‑3
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