Bibliothèque de droit privé - Tome 633 - Le renouveau de l'action oblique - 285

DOMAINE DE LA SUBSTITUTION
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inverse pour le débiteur de consentir à ce que le créancier exerce des droits et actions
exclusivement rattachés à la personne est plus délicat. Cette possibilité risquerait en
effet de devenir de style91. Cependant, la liberté des parties devrait les autoriser à
juger de l'opportunité d'un tel aménagement, quitte à ce que le juge opère a posteriori,
soit au moment de l'exercice du droit, un contrôle.
529. Approche téléologique : finalité de protection - Plus qu'une raison technique,
c'est l'existence d'une finalité de protection qui serait à même d'exclure les
droits et actions attachés à la personne du domaine de l'action oblique.
530. L'intérêt de la question est grand dans la mesure où l'on voit dans l'action
oblique un mécanisme de coopération entre le créancier et le débiteur. Dès lors, l'aménagement
conventionnel de l'action oblique revient aussi à savoir si l'action oblique
peut être employée comme un substitut au mandat, à la différence (pouvant être vue
comme avantageuse) qu'il ne peut être révoqué. Cette interrogation confirme que l'action
oblique est une technique d'exercice des droits dont la finalité est abandonnée à
celui qui l'exerce, plutôt qu'une mesure conservatoire ou une voie d'exécution. Une
telle recherche invite cependant à se demander, d'une part, si la révocabilité ne constitue
pas une protection de l'essence du mandat dont on ne saurait admettre qu'elle soit
tournée, d'autre part si le caractère légal de l'action oblique peut être compatible avec
un aménagement conventionnel.
531. S'agissant de la place de la révocabilité dans le mandat tout d'abord, si
l'article 2004 du Code civil prévoit la révocabilité ad nutum du mandat, la jurisprudence
a cependant affirmé depuis longtemps qu'il pouvait être dérogé à cette révocabilité.
Encore faut-il distinguer la question de la libre révocabilité de celle de la révocabilité
sans indemnité.
S'agissant de l'aménagement conventionnel d'un mécanisme légal ensuite, l'argument
semble plus faible. On peut très bien concevoir une protection, c'est moins le
caractère légal que la finalité qui fait difficulté : dans ce cas-là on retient que le mécanisme
de substitution peut être aménagé dès lors que sa finalité de protection de son
titulaire est sauvegardée. Au-delà, on peut distinguer deux interrogations : celle de
l'attribution d'une action oblique par voie conventionnelle, et celle d'une dérogation
conventionnelle aux droits et actions attachés à la personne. Les conventions possibles
sur l'action oblique ne se réduisent pas uniquement à l'extension ou à la réduction
du domaine des droits et actions attachés à la personne. D'autres conventions
91. Ibid. nº 71 p. 62 : « On peut s'interroger sur le caractère d'ordre public de l'article 1166. Cette
question se pose de deux manières. D'une part, l'autorisation consentie à un débiteur de convenir avec
ses créanciers que certains droits peuvent passer du domaine de la règle à celui de l'exception consiste à
savoir si les articles 2284 et 2285 sont d'ordre public ou non, car le droit de gage général serait ici diminué.
Bosc s'oppose à une telle possibilité, soulignant qu'il ne s'agit pas d'une convention mais d'une garantie
légale, d'un principe de protection des créanciers, qui doit être déclaré d'ordre public. Planiol et Ripert
acceptaient quant à eux que le créancier renonce à de telles actions ; comme l'explique Su Won Oh, le
droit de gage général, s'il existe de plein droit, n'est qu'accessoire à la créance, l'action oblique étant un
des moyens de la protéger ; il faut donc reconnaître au créancier la liberté d'exercer la créance ou d'y
renoncer. Cette orientation semble être celle prise par la jurisprudence. Le cheminement inverse est plus
délicat : le débiteur peut-il renoncer à l'attache à la personne ? Pour Bosc, le droit étant attaché à sa personne
dans son unique intérêt, le débiteur peut par conséquent refuser la faveur qui lui est faite. Mais cette
conclusion ne semble pas acceptable, car elle amènerait le risque qu'une telle clause devienne de pur style,
et fasse échec à la protection nécessaire, fondamentale et extra-pécuniaire qu'apportent les droits et actions
attachés à la personne ».

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