Bibliothèque de droit privé - Tome 635 - La pratique du précédent en droit français - 84

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LA PRATIQUE DU PRÉCÉDENT EN DROIT FRANÇAIS
tables p. 691-912-1033). Et vous l'avez reproduite s'agissant d'un tableau
d'avancement, dès lors que ce tableau comporte un nombre maximum d'agents
(CE 27 avril 2011, M. R..., nº 326936, à mentionner aux tables) »83.
Compte tenu de la constance de la jurisprudence à retenir dans des situations
analogues une nature juridique identique, les précédents mentionnés l'autorisent à
conclure sans ambiguïté au caractère indivisible de l'arrêté préfectoral et à l'erreur
de droit, et à préciser ainsi le champ des décisions à caractère indivisible.
85. Il convient de conclure en attirant l'attention sur le fait que la qualification
juridique, en procédant à la détermination des cas d'application de la règle, est susceptible
d'emporter un renouvellement dans l'interprétation de la règle elle-même. En effet,
si l'on admet que les règles juridiques formalisent en leur sein une série de situations de
fait ou de cas qui tombent dans leur champ84,alors n'est-il pas possible d'admettre que
la modification du champ d'application d'une règle entraîne modification de l'interprétation
de la règle85 ? Ces observations reviennent finalement à relativiser la différence
qu'il existerait fondamentalement entre les opérations d'interprétation et de
qualification86. En raison de la récurrence de la structure syllogistique dans la motivation
des juridictions suprêmes, ces deux étapes sont le plus souvent envisagées successivement
: il convient d'abord de déterminer quel est le sens de la règle applicable au litige
avant d'établir si les faits de l'espèce entrent dans le champ d'application de la règle dont
le sens a été préalablement défini. Pour autant, notons qu'au contentieux, l'application de
la règle est indissociable de la prise en considération du cas de sorte que, si interprétation
et qualification sont formellement dissociables et dissociées, elles ne sont pour le raisonnement
juridique que les deux faces d'une même pièce87.
SECTION 2
LA CONSTRUCTION PAR RÉVISION
86. La présente section se focalise, non plus sur les problèmes relatifs à l'interprétation
d'une règle juridique et à la qualification, mais sur la possibilité de réviser le
contenu d'une règle. Deux hypothèses seront successivement envisagées. En premier
lieu, sera évoquée l'extension d'une règle jurisprudentielle à un cas nouveau qui n'est
a priori régi par aucune règle (§1). Cette extension peut le cas échéant être comprise
comme la construction d'une nouvelle règle, déduite de la première par le biais d'un
raisonnement par analogie88. En second lieu, nous aborderons la question de l'ajustement
de la règle jurisprudentielle à l'occasion de l'examen d'un cas (§2).
83. Ibidem.
84. V. F. ROUVIÈRE, « Autour de la distinction entre règles et concepts », RRJ 2013-5, p. 2017 et s.,
spéc p. 2022.
85. En ce sens, v. Ch. PERELMAN, Droit, morale et philosophie, LGDJ, 2e
éd. revue et augmentée,
1976, p. 32 : « Au lieu d'adapter une loi grâce à l'interprétation de ses termes, on peut la modifier en agissant
sur le champ d'application de ses termes. ».
86. Rappr. G. MARTY, La distinction dufait et du droit. Essai sur le pouvoir de contrôle de la Cour
de cassation sur les juges dufait, Sirey, 1929, p. 205, nº 115.
87. En ce sens, v. F. OST, M. VAN DE KERCHOVE, De la pyramide au réseau ? Pour une théorie
dialectique du droit, Publication des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, p. 393.
88. V. Y. GAUDEMET, Les méthodes du juge administratif, LGDJ, coll. « Anthologie du droit »,
2013, p. 61.
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