Bibliothèque de droit privé - Tome 626 - La liberté et l’ordre public contractuels à l’épreuve des droits fondamentaux - 687

LA PROPORTIONNALITÉ DE LA RENONCIATION, CONDITION DE VALIDITÉ OBJECTIVE
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1230. Ainsi, malgré les liens qu'elle entretient avec la mise en balance des intérêts
et le contrôle de la nécessité, la concordance pratique correspond à une forme
spécifique du contrôle de proportionnalité, qui tend à la recherche d'un compromis
entre les intérêts en présence. Toutefois, ce contrôle n'est pas réellement mis en
œuvre par les juges internes qui préfèrent, lorsqu'ils l'estiment nécessaire, recourir à
un mécanisme de compensation de l'atteinte portée au droit fondamental.
B. LA COMPENSATION DE L'ATTEINTE
1231. Le contrôle de proportionnalité peut également avoir une « vocation
compensatoire »598. Il permet en effet de s'assurer que l'effet négatif de l'atteinte est
contrebalancé par un effet positif pour le débiteur de l'obligation. L'exigence d'une
contrepartie à l'atteinte, de nature à conférer un intérêt au renonçant, traduit la mutation
de l'exigence de proportionnalité lorsqu'elle pénètre dans la sphère contractuelle.
Elle conduit alors à s'assurer que chaque obligation a une contrepartie adéquate, et
débouche sur une exigence d'« équilibre dans la commutation »599. Ainsi, l'atteinte
portée au droit fondamental doit être compensée, ce qui implique de rechercher son
intérêt pour le débiteur de l'obligation. Cet intérêt sera diversement apprécié selon que
l'atteinte résulte d'une obligation accessoire au contrat (1) ou découle de l'objet
même du contrat (2).
1. La compensation des atteintes accessoires aux droits fondamentaux : l'exemple
des clauses accessoires au contrat de travail
1232. Les clauses accessoires au contrat de travail font l'objet d'un régime distinct
selon qu'elles portent ou non atteinte à la liberté du travail. Si l'exigence d'une
contrepartie financière semble limitée aux clauses portant atteinte au libre exercice de
l'activité professionnelle du salarié, les autres atteintes accessoires aux droits fondamentaux
n'échappent pas à la logique de la compensation.
1233. La compensation des atteintes à la liberté du travail : l'exigence
d'une contrepartie financière. Depuis trois arrêts rendus le 10juillet 2002 par la
chambre sociale de la Cour de cassation, au visa de l'ancien article L. 120-2 du
Code du travail et du principe du « libre exercice d'une activité professionnelle »600,
l'existence d'une contrepartie financière est une condition de validité de la clause de
non-concurrence stipulée dans un contrat de travail601. Cette solution a été récemment
copropriétaires, qui en enlève quelques-unes et qui en conserve d'autres, le tout variant selon les situations
en jeu et les prérogatives invoquées ». Il s'agit donc de mettre en balance les intérêts en conflit en créant,
lorsque c'est possible, une norme nouvelle qui permettra l'optimisation de chacun des principes concurrents.
598.
A.-A. HYDE, thèse préc., spéc. nº 704, p. 493.
599. A.-A. HYDE, thèse préc., spéc. nº 704, p. 493. L'auteur souligne que c'est « l'application même
du contrôle de proportionnalité qui justifie que le juge vérifie toujours que l'atteinte portée à la liberté
d'une partie ne le soitjamais sans contrepartie ». V. aussi thèse préc., spéc. nº 710, p. 498.
600. Cass. soc., 10 juillet 2002, Bull. civ. V, nº 239, nº 99-43334, 00-45387 et 00-45135 ; D. 2002,
p. 2491, note Y. SERRA ; RDC 2003, p. 17, note J. ROCHFELD ; Defrénois 2002, p. 1619, obs.
R. LIBCHABER ; JCPG 2003, I, 130, nº 1, obs. P. MORVAN et RTD civ. 2003 p. 58, obs. J. HAUSER ;
Dr. soc. 2002, p. 949, obs. R. VATINET.
601. « Attendu qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection
des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des
spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une
contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives », Cass. soc., 10juillet 2002, préc. L'exigence
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