Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 166 - Les dispositions inexploitées de la Constitution de 1958 - 362

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LES DISPOSITIONS INEXPLOITÉES DE LA CONSTITUTION DE 1958
qu'intervenait la nomination. Cette procédure d'investiture sous la IVe
République
n'était qu'une traduction - peut-être la plus exigeante - de cette règle du parlementarisme
qui veut que le gouvernement ait la confiance du Parlement avant sa prise de
fonction. La combinaison de la déclaration de Michel Debré dans son discours devant
le Conseil d'État en août 1958 indiquant que la Ve
régime parlementaire88
République mettait en place un
et de la loi constitutionnelle du 3juin 1958 exigeant que la
nouvelle Constitution prévît la responsabilité du gouvernement devant le
Parlement89 donne à penser que le gouvernement doit solliciter la confiance du Parlement
au début de son existence.
776. L'article 49 de la Constitution traduirait ce principe inhérent au Parlementarisme.
Aux termes de son alinéa 1er, « le Premier ministre, après délibération du
conseil des ministres, engage devant l'Assemblée nationale la responsabilité du gouvernement
sur son programme ou éventuellement sur une déclaration de politique
générale ». Cette disposition suggère que le gouvernement nommé par le président
de la République sollicite la confiance du Parlement à travers la soumission de son
programme ou d'une déclaration de politique générale. Dans la pratique, ce mécanisme
n'a pas bien fonctionné. La question de confiance sur le programme est à
l'abandon et cette déshérence n'est pas sans lien avec le présidentialisme majoritaire.
777. Au regard de l'article 49, la question de confiance porte a priori sur le programme
du gouvernement et accessoirement sur une déclaration de politique générale.
C'est « sur le " programme " du gouvernement que devrait porter le vote de l'Assemblée
nationale, puisque ce n'est qu' " éventuellement " que l'usage de cette disposition
peut porter sur une déclaration de politique générale »90. Pourtant, la pratique est tout
autre. La question de confiance sur le programme est très rare. Depuis 1958, cette
disposition n'a été utilisée dans ce sens qu'à cinq reprises91, dont deux fois avant la
production du fait majoritaire en 1962, donc antérieurement à la naissance du présidentialisme
majoritaire. En revanche, presque tous les Gouvernements sous la
Ve
déclaration de politique générale92.L'on se demande alors ce qui pourrait expliquer
cette différence en pratique, d'autant plus que le texte constitutionnel suggère que la
question de confiance porte en principe sur le programme.
République ont fait usage de l'article 49, alinéa 1er
de la Constitution pour une
778. La Constitution distingue le programme et la déclaration de politique générale
sans en préciser la différence. La question de confiance porte sur le programme
du gouvernement, ou éventuellement sur une déclaration de politique générale, mais
aucune règle juridique ne définit le contenu respectif de ces deux catégories. En l'absence
de précision juridique, « peu importe le contenu : est un programme ou une
88. Le choix du régime parlementaire sonnait comme une évidence pour Michel Debré : « Pas de
régime conventionnel, pas de régime présidentiel : la voie devant nous est étroite, c'est celle du régime
parlementaire », déclarait-il.
89. Loi constitutionnelle du 3juin 1958 portant dérogation transitoire aux dispositions de l'article 90
de la Constitution et prévoyant un référendum, JO du 4juin 1958 p. 5326.
90. M. Lascombe, Code constitutionnel et des droits fondamentaux, Dalloz, (actualisation : 24 septembre
2018).
91. Il s'agit du gouvernement de Michel Debré le 15janvier 1959, du premier gouvernement
de Georges Pompidou le 26 avril 1962, du deuxième gouvernement de Raymond Barre le 26 avril 1977 et
des deux Gouvernements de Pierre Mauroy les 7 octobre 1981 et 23juin 1982.
92. On compte les rares fois où un gouvernement n'a pas engagé sa responsabilité sur une déclaration
de politique générale depuis 1958 : il s'agit des Gouvernements Pompidou 3 et 4, Messmer 1 et 3, Barre 1,
Mauroy 1, Rocard 1, Cresson, Raffarin 1 et Fillon 1.

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