Cours - Droit administratif - 18e - 31

La juridiction administrative
25. L'article 52 de la Constitution de l'an VIII (1799) dispose que : « Sous la direction des consuls, un Conseil
d'État est chargé de rédiger les projets de loi et les règlements d'administration publique, et de résoudre
les difficultés qui s'élèvent en matière administrative ».
D'emblée, la triple mission législative, administrative et contentieuse qui restera sienne lui est assignée :
législative, car il prépare les projets de loi ; administrative, car il est étroitement associé à la préparation
des décrets et conseille le gouvernement sur les problèmes d'administration générale : ainsi son rôle dans
l'élaboration des grands codes, en particulier le Code civil, Napoléon assistant par goût moins que par devoir
à plus de la moitié des 107 séances de travail nécessaires à sa rédaction.
Quant à ses fonctions juridictionnelles, elles se manifesteront lorsque sera créée, en 1806, au sein du Conseil,
une Commission du contentieux, chargée de préparer les délibérations de l'Assemblée générale du Conseil
d'État. Si elle n'avait que le pouvoir de conseiller le chef de l'État sur la solution à donner aux litiges, ses avis
éclairés étaient généralement suivis. Napoléon, rappelle-t-on, n'a jamais refusé de signer une décision contentieuse
proposée par la Commission. Mais il pouvait soit refuser de la saisir, soit lui retirer une affaire délicate.
La justification de la création, en 1806,
de la Commission du contentieux du Conseil d'État
« Je veux instituer un corps demi-administratif, demi-judiciaire, qui réglera l'emploi de cette portion
d'arbitraire (ce dernier terme devant être traduit par discrétionnaire) nécessaire dans l'administration
de l'État ».
- La loi du 28 pluviôse an VIII, qui crée l'administration préfectorale, met en place les conseils de préfecture,
départementaux jusqu'en 1926, avec comme fonction de conseiller les préfets. Ils reçoivent des
compétences juridictionnelles en matière de contributions directes, travaux publics, voirie, domaines
nationaux, qu'ils exercent de manière autonome, à la différence du CE.
- La justice reste retenue en droit. C'est la théorie du ministre-juge, en vertu de laquelle le premier
degré de juridiction administrative est le ministre, seul compétent pour connaître des réclamations des
administrés sous réserve, pour les affaires les plus importantes, de l'intervention du chef de l'État censé
rendre définitives les décisions par sa signature.
C. Vers la justice déléguée
26. Les pouvoirs reconnus au Conseil d'État fluctuent au gré des régimes. Faibles sous la Restauration et la
monarchie de Juillet, ils retrouvent leur vigueur sous la deuxième République et le second Empire. Si le rôle
de conseil sur les projets de loi fut ténu sous la IIIe
République, c'est à cette époque que la haute juridiction
conquiert son indépendance en matière contentieuse et peut mener à bien l'élaboration de grands principes
jurisprudentiels, entreprise qui lui confère son autorité et son prestige.
Son accession à l'indépendance suit les étapes suivantes :
* Justice déléguée en fait : Les décisions sont préparées par le « technicien » du droit qu'est la Commission
du contentieux du Conseil d'État dont, en pratique, le chef de l'État suit toujours les avis.
L'administration aura « la certitude que ses juges seront pénétrés de son esprit et familiers de ses besoins »
(Vivien).
* Justice déléguée en droit : Elle s'affirme en deux temps : d'une part, la loi du 24 mai 1872 donne au Conseil d'État
le pouvoir de juger souverainement et de manière indépendante « au nom du peuple français », sans que ses
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