Précis Domat - Droit des régimes matrimoniaux - 13e - 186

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX
L'époux débiteur pourrait essayer de profiter de la présomption de communauté
pour vider son patrimoine propre de tout meuble. L'article 1411, alinéa 2 du Code
civil assure la protection des créanciers en étendant leur droit de poursuite aux
biens de la communauté « quand le mobilier qui appartient à leur débiteur au jour
du mariage ou qui lui est échu par succession ou libéralité a été confondu dans le
patrimoine commun et ne peut plus être identifié selon les règles de l'article 1402 ».
Il faut préciser que le terme « mobilier », en l'absence d'autre précision du législateur,
ne vise pas seulement les meubles meublants mais semble utilisé dans une
conception large, par opposition aux immeubles.
La justification de cette règle est importante à préciser car elle emporte de notables
conséquences pratiques. Si l'on pourrait la considérer comme une sanction du
comportement frauduleux ou au moins négligent des époux, la doctrine majoritaire
préfère y voir une présomption de propre bénéficiant aux créanciers que la loi veut
protéger3
. Ainsi s'explique que la charge de la preuve de l'absence de confusion de
. Au-delà, l'époux débiteur peut-il
.
mobilier pèse sur l'époux débiteur, qui doit établir globalement la consistance de
son mobilier propre pour limiter les poursuites4
faire échapper un bien à une saisie en démontrant son caractère commun ? La jurisprudence
ne semble pas l'admettre5
Les époux acquittent traditionnellement leurs dettes par leurs revenus et en particulier
leurs gains et salaires. Leur chute en communauté pourrait réduire d'autant
le droit de poursuite des créanciers, parfois de manière injuste : il suffit d'imaginer
la situation d'un créancier antérieur au mariage comptant sur les salaires de son
débiteur célibataire pour obtenir paiement et voyant ceux-ci lui échapper après le
mariage de son débiteur.
Aussi, par exception au principe de corrélation entre l'actif et le passif, le législateur
de 1985 a-t-il permis à ces derniers de se faire payer non seulement sur les
biens propres mais également sur les revenus de leur débiteur (C. civ., art. 1411,
al. 1). L'expression de « revenus » vise avec certitude les gains et salaires et les
fruits et revenus de propres, sous forme de créances ou perçus. Cette dernière hypothèse
n'est pas sans soulever des difficultés pratiques. Quid des revenus versés à un
compte en banque dans lequel ils se fondent avec d'autres sommes ? On a proposé
de limiter le droit de poursuite des créanciers aux revenus qui restent individualisés
en ne se confondant pas avec d'autres sommes communes et qui ne sont pas économisés,
auquel cas ils perdraient leur nature pour devenir bien commun ordinaire6
.
D'autres auteurs suggèrent d'appliquer par analogie la règle posée par l'article
1414, alinéa 2 du Code civil (sur cette règle, cf. supra no
équivalentes à propos de l'article 1415 du Code civil, cf. supra no 204)7
200 ; sur des difficultés
.
■ 3. CHAMPENOIS,no
■ 4. Cass. 1re
■ 6. CHAMPENOIS,no
186
435 ; COLOMER,no
806.
civ., 16 mai 2000, D. 2000, IR.174 ; Defrénois 2000.1181, obs. G. CHAMPENOIS ;
RTD civ. 2001.422, obs. B. VAREILLE (contra, auparavant, Lyon, 16 oct. 1975, Defrénois 1977.1579, note
G. CHAMPENOIS).
■ 5. Cass. 1re
civ., 16 mai 2000, cit.
431.
■ 7. TERRÉ et SIMLER,no
372.

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