Précis Domat - Droit des régimes matrimoniaux - 13e - 326

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX
sûretés. L'époux créancier poursuit le recouvrement de sa créance d'abord sur les
biens existants du débiteur, puis, subsidiairement, si ces biens se révèlent insuffisants,
sur les biens aliénés pendant le cours du régime sans le consentement de son
conjoint : ces aliénations lui sont inopposables. Si elles doivent être remises en
cause, il faut commencer par les plus récentes, pour remonter ensuite dans le
temps (C. civ., art. 1577), l'action se prescrivant par deux ans à compter de la clôture
des opérations de liquidation (C. civ., art. 1578, al. 4). Le renvoi de ce dernier
texte à l'article 1167 du Code civil, siège de l'action paulienne, permet d'en préciser
le régime par référence au droit commun : en cas d'aliénation à titre onéreux, le
demandeur doit établir le concert frauduleux entre son conjoint et le tiers acquéreur,
la complicité du tiers étant inutile pour les actes à titre gratuit. Enfin, par transposition
des règles de l'article 1573 du Code civil, l'aliénation à charge de rente viagère
ou à fonds perdus doit être présumée frauduleuse.
401 Garantie de la créance de participation par l'hypothèque légale. - L'article
2402, alinéa 1, ancien du Code civil disposait que le choix de la participation
aux acquêts conférait de plein droit à chaque époux, sauf convention contraire, la
possibilité d'inscrire l'hypothèque légale pour la sûreté de la créance en participation.
Le principe a été conservé par l'ordonnance du 15 septembre 2021 réformant
le droit des sûretés et inscrit dans l'article 2394 du Code civil : quand les époux ont
stipulé la participation aux acquêts, chacun a, sauf convention contraire, le droit
d'inscrire l'hypothèque légale pour garantir sa créance de participation. L'hypothèque
est générale et peut concerner tout immeuble appartenant au conjoint. Elle
peut être inscrite avant la dissolution du régime matrimonial, prenant effet à
compter de cette dissolution, si les immeubles sur lesquels elle porte existent
encore dans le patrimoine de l'époux débiteur (C. civ., art. 2394, al. 2). Le conjoint
créancier ne dispose pas de droit de suite sur les immeubles aliénés avant la dissolution
: la vente de l'immeuble durant le mariage privera de tout effet l'hypothèque.
L'hypothèque peut également être inscrite dans l'année qui suit la dissolution du
mariage, ayant alors effet à partir de sa date (C. civ., art. 2394, al. 4). En cas de
liquidation anticipée, l'inscription antérieure à la demande a effet du jour de celleci,
l'inscription postérieure n'ayant effet que de sa date (C. civ., art. 2394, al. 3).
§2. EXCEPTION : LE RÈGLEMENT EN NATURE22
402
Domaine. - Le paiement en nature peut être prévu par les
conventions matrimoniales : « Il peut être convenu entre les époux que celui d'entre
eux qui, lors de la liquidation du régime, aura envers l'autre une créance de participation,
pourra exiger la dation en paiement de certains biens de son conjoint, s'il
établit qu'il a un intérêt essentiel à se les faire attribuer » (C. civ., art. 1581, al. 3).
La notion d'« intérêt essentiel », dépendante des circonstances, relève de l'appréciation
souveraine des juges du fond. Un tel intérêt pourrait par exemple être constitué
par le fait qu'un des époux veut créer pendant le mariage un fonds de commerce à
■ 22. R. CONTIN, « Les règlements en nature dans les partages matrimoniaux », RTD civ. 1977.433, spéc.
no
40 et s.
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