Systèmes - Droit constitutionnel britannique - 3e - 221

Le gouvernement central
forcément y habiter. Vers les années 1830, bien que le Chancelier de
l'Échiquier s'installe au numéro 11, le quartier est jugé peu fréquentable,
justifiant des projets de déménagement sérieux après l'assassinat
de l'un des secrétaires de Robert Peel. Disraeli et Gladstone se
chargèrent de redonner du lustre au Number Ten. Après le Marquis
de Salisbury, tous les Prime ministers y dirigent le Royaume-Uni et y
logent. Quelques arrangements sont parfois admis, comme en 2011.
Gordon Brown préférait le 11 du Chancelier de l'Échiquier, plus
vaste.
De plus en plus autonomes, le gouvernement et ses démembrements
se passent fréquemment de la délibération et du contrôle parlementaires,
au risque de mettre en péril l'effectivité du principe d'accountability.
Trois caractéristiques du fonctionnement du
parlementarisme britannique (non exhaustives) l'illustrent. En premier
lieu, il est presque impossible d'engager la responsabilité du gouvernement,
comme de faire échec à sa volonté de légiférer. En deuxième
lieu, la législation déléguée a connu une augmentation exponentielle
dans les dernières décennies qui se double d'un recours accru à la skeleton
legislation et aux clauses Henry VIII. Derrière ces expressions se
dissimulent, d'une part, des législations sans réel contenu qui laissent
une marge de manœuvre normative très étendue à l'Exécutif et, d'autre
part, des modifications de la loi sans passer par le Parlement (v. supra).
La crise de la Covid-19 et le désir des conservateurs de supprimer l'essentiel
des normes d'origine européenne dans l'ordre juridique interne
ont considérablement intensifié le phénomène. En troisième lieu, les
autorités administratives se sont multipliées pour assurer la régulation
de nombreux pans des activités économiques et sociales. Si certaines
d'entre elles demeurent indépendantes du gouvernement (Quasi-Autonomous
Non-Governmental Organisations comprenant les départements
non ministériels, quelques agences et les organismes publics non
départementaux), elles produisent de plus en plus de textes dictant un
comportement aux administrés qui en relèvent. Or ces directives,
codes ou autres chartes ne passent pas sous les fourches caudines
de Westminster. Face à ces phénomènes, le Parlement n'est pas en
capacité d'accompagner et de superviser l'Exécutif, même si les efforts
en faveur d'une revalorisation du travail parlementaire ne sont pas toujours
vains. La conséquence est logique : le Parlement ne tend à exister
qu'à travers la négociation, la médiation ou l'opposition au gouvernement.
Nous ne sommes, en définitive, pas très éloignés du rôle qui
avait été le sien à l'égard du monarque avant son triomphe de 1688.
La difficulté est que l'organe avec lequel Westminster est dans un rapport
de force émane de ses propres rangs et de la majorité aux
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